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Fanfare - Emmanuel Adely
par penvins

Fanfare
Emmanuel Adely
Stock, 2002

 

Le héros revient d'Egypte où il a rencontré son frère, il assiste avec M dans un théâtre parisien à une lecture des Liaisons dangereuses. Distance entre ce lieu de représentation qu'il ne supporte plus - ce monde est mort, il est aveugle et il ne voit pas qu'il est mort. - et la vie. Il est prisonnier à l'intérieur de ce théâtre -lieu hors du réel - sans encore rêver d'en sortir, écoutant les bruits du ventre de M - lieu de l'immaîtrisable - et non de cette raison cartésienne des jardins à la française. Appel à se laisser aller, à la pulsion, à se lâcher d'un homme qui n'en peut plus du raisonnement: ...rien n'entrait dans les allées rectilignes de ma pensée et donc je ne savais où placer ce frère dans le plan extrêmement classique de ma tête à la française... et que permettra l'expérience du désert - retraite - retour au silence : Je vais arriver nu dans ce désert. dit-il comme pour souligner la signification.

Dernière masturbation avant l'envol pourrait-on dire - espérer - de cette écriture tant elle est obsessionnelle, écriture de plaisir - hors de la vie - qui me fait me souvenir du fameux 'Plaisir du texte" lorsque Roland Barthes rêvait d'échapper à l'obsession de la théorie. Adely tente ici d'échapper à la littérature, de remettre le réel dans le champ de l'écriture, de s'abstraire de ce lieu de non vie: ...j'étais venu au Caire sur les traces du nom de mon père mais pas sur les traces de la vie de mon père et une fois dans la rue du nom de mon père j'avais compris le ridicule absolu de ma démarche qui était de retrouver la mort de mon père et pas le vivant de mon père. Il lui faut se hisser hors du trou et non y mourir comme ces deux enfants dont on ne sait lequel a entraîné l'autre au fond d'une crevasse, scène rejouée sur différents registres, de la mort de ces deux enfants que sont supposés pleurer leurs parents, pour enfin se débarrasser de ce mythe des origines: On nous a appris à vénérer ce qui n'existe plus et à nous fonder sur ce qui n'existe plus et ne peut même plus servir de base au réel... pour enfin tenter - fut-ce en ne retardant indéfiniment le moment - j'avais éprouvé cette joie folle d'être au seuil de l'échec - d'accomplir, de faire.

Ce roman est en effet le récit d'un accouchement, de celui du Verbe qui délivre: dire à son frère que l'on est son frère, c'est à dire se dire à soi que l'on est bien le fils de son père, entrer dans le réel et le lui dire dans une langue étrangère (qui n'est donc pas la langue maternelle), dire aussi à M c'est à dire à Moi que l'on va sortir du théâtre, entrer enfin dans la vie. De M on ne sait rien, en lisant ce livre interrogez-vous sur M est-ce un homme, est-ce une femme ? ou tout simplement le double du narrateur celui qui reste dans le théâtre, l'ancien moi que l'on abandonne près du ventre de M (autre lecture...) en revenant d'Egypte où l'on a enfin osé parler du réel.

 

Penvins
e-litterature.net©


04/01/2003

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