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En écho aux dialogues de Florence Trocmé
par Meleze

En écho aux dialogues de Florence Trocmé

 

Moi aussi j’avais des notes sur un dialogue entre un écrivain et un musicien. L'écrivain s’appelle Oscar Wilde et le musicien Richard Strauss. Le thème de ce dialogue est le mythe de Salomé et l'hypothèse faite au sujet de ce dialogue est que 'l'écrit se transforme en musique parce qu’il y a dans l’histoire de Salomé une question refoulée’.

Bien entendu vous voulez comprendre. Vous n’avez pas lu Oscar Wilde. Ce thème de Salomé si célèbre dans la deuxième moitié du 19° siècle (notamment après le Salammbô de Flaubert), n’est jamais parvenu à vos oreilles. Et bien il s’agit de la fille du roi Hérode Antipas gouverneur de la Palestine sous l’empereur Tibère à l'époque de la naissance du christianisme, qui a demandé à son père qu’on lui apporte la tète du prophète juif Jean-Baptiste emprisonné parce qu’il avait annoncé l’arrivée du christianisme quelques temps avant la prédiction de Jésus.

On peut considérer Jean-Baptiste comme le premier martyr chrétien bien qu’il ne soit pas le fondateur du christianisme, ou bien le considérer comme un simple juif inspiré par Dieu.

Dans le premier cas qui est celui d’Oscar Wilde, lorsque Salomé demande la tète de Jean-Baptiste, l’histoire antique est transformée d’une façon légère en un drame de mœurs. Le lecteur se demande s’il ne s’agit pas du fantasme du coureur de jupon d’avoir la tête coupée par une de ses maîtresses en punition de ses infidélités.

Dans le deuxième cas , c’est la tète d’un juif qui est demandée et je prie l’amateur d’ "Exigence littérature" de se reporter à un livre de François Weyergans datant de 1973 portant pour titre le Vizir. Car le héros du Vizir est un très grand coureur de jupon et alors que l'on s’attend sans cesse à ce que le personnage de Salomé dans ce roman, le Vizir, demande la tète du Casanova qu’est Weyergans, c’est le contraire qui se passe.

Salomé ne demande rien et c’est François Weyergans s’assimilant au personnage de Jean-Baptiste qui s'arrête terrorisé devant l’interprétation antisémite. Il réalise soudain que lorsque Salomé demande au roi Hérode qu’on lui apporte la tête du prophète, c’est la tête d’un juif qu’elle demande, et pas celui d’un coureur de jupon, si bien que le fantasme central du mythe que partage Weyergans et devant lequel la logorrhée de son livre s'arrête comme devant un point qu’il ne voudrait pas écrire, c’est "d’être celui qui a peur d’avoir la tête coupée", terreur que nous sommes assez nombreux à avoir partagée après la guerre.

Ce roman le Vizir est l’histoire d’une psychanalyse. Comme dans toute cure le malade cherche les facteurs du refoulement qui le trouble. Et on comprend maintenant combien la peur d’être celui qui aura la tête coupée (et bien entendu l’amateur d’"Exigence" aura intégré le sous-entendu qu’au delà de sa tête c’est sa propre impuissance qui angoisse notre héros) peut être la cause d’un trouble du comportement.

C’est ici qu’il nous faut revenir à la musique de Richard Strauss qui dans ce roman de François Weyergans est chantée par Salomé, non pas Salomé l’antique, mais Salomé la maîtresse du héros de son roman. Et donc pourquoi Salomé chante-t-elle sinon parce que, des deux acceptions de son histoire, l’une confine à l’indicible?

 

 

Mélèze

mars 2002

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