Né en Ecosse en 1860, James Matthew Barrie est le créateur du personnage de « Peter Pan » ou « Le garçon qui ne voulait pas grandir » dans une pièce à succès créée à Londres . Le sujet fut repris ensuite au cinéma , mais c’est la version en dessins animés de Walt Disney réalisée en 1951 qui remporta un succès mondial.

L’écrivain François Rivière, dans son ouvrage « J.M.Barrie, le garçon qui ne voulait pas grandir » (Ed. Calmann-Lévy 2005), a voulu découvrir la personnalité de l’auteur de Peter Pan, restée jusqu’à présent méconnue, ainsi que les rapports entre l’écrivain et son œuvre..



Né le 9 mai 1860 en Ecosse, au sein d’une famille modeste et puritaine de huit enfants, J.M. Barrie vécu une enfance heureuse jusqu’à l’âge de six ans. La mort accidentelle de son frère aîné David, 13 ans, fils préféré de la mère Margaret, au caractère fantasque, plongea celle-ci dans le désespoir et le mutisme.

Le petit James essaiera alors de remplacer ce frère disparu, de l’imiter, de porter ses vêtements. Il souhaite ne pas grandir et d’ailleurs demeurera toujours de petite taille, fluet, à la tête disproportionnée, incapable de maturité affective.

Il tient de sa mère une imagination fertile, l’art de conter et l’amour de la littérature; mais sa sensibilité souffre de l’attitude déroutante de sa mère qui le culpabilise par ses lamentations et les éloges qu’elle fait de son fils décédé.

Il se réfugie dans le rêve et la lecture: « La littérature était mon seul jouet ». Après des études secondaires à Glasgow et Dumfries, il obtient en quatre ans une maîtrise à l’université d’Edimbourg. D’abord journaliste, il s’installe ensuite à Londres à son compte en 1885. 


Il épouse en 1894 l’actrice Mary Ansel, mais ce mariage sans enfant est un échec et aboutit à un divorce demandé par l’épouse en 1909. J.M.Barrie fut l’ami du couple Davies dont il aimait en secret la femme, Sylvia, mère de cinq enfants.

Barrie avait une grande affection pour ces enfants qu’il n’hésitera pas à adopter après la mort prématurée des parents et qui lui donnèrent l’idée du personnage de Peter Pan.




Peter Pan est un roman fantastique d’imagination et d’aventures mais aussi une méditation sur le temps et la vie de l’enfance.

J.M.Barrie a inventé son héros en jouant avec les enfants de ses amis Davies : Peter Pan est un gamin déluré, capable de voler, qui tutoie les étoiles et les sirènes et vit en compagnie des fées et des enfants perdus dans une île sauvage appelée « Le pays de Nulle Part », en fait un îlot posé au milieu de la rivière Serpentine qui traverse le parc de Kensington ...

Le crocodile représente le temps lui-même. Il a avalé un réveil émettant un tic-tac et guette le capitaine Crochet pour le dévorer. Cet affreux capitaine symbolise le monde des adultes, menaçant et cruel dans l’esprit des petits garçons...


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J.M.Barrie eut une carrière très honorée : titre de baronnet en 1913, ordre du mérite en 1922, recteur à l’Université de St Andrews, puis chancelier à l’Université d’Edimbourg.

Pourtant sa solitude et son désespoir ne font que s’accroître au fil des années; plusieurs de ses enfants adoptés connurent un destin tragique (deux suicides, un mort à la guerre) et il fut très affecté par ces disparitions successives.

Isolé dans sa tour d’ivoire, seul le monde de l’enfance et à travers lui la recherche de sa propre jeunesse guident encore sa plume :

« La féerie de la scène lui était apparue comme la métaphore de la vie telle qu’il désirait la vivre, loin de la réalité souvent lugubre, voire effrayante, qu’il ne maîtrisait pas ».






Peter Pan est le personnage secondaire d’un premier livre de Barrie « Le Petit Oiseau blanc » , conte merveilleux et étrange partiellement traduit en français sous le titre « Peter Pan dans les jardins de Kensington ».

C’est ce personnage qui deviendra le héros à succès d’une pièce de théâtre, puis du roman qui fait encore rêver petits et grands.

Barrie estimait que, pour vivre heureux, les adultes doivent savoir regarder autour de soi et ne pas oublier leur âme d’enfant.




Sens du mythe de Peter Pan


Dans son site internet consacré à J.M.Barrie, Céline Albin Faivre écrit :


« Peter Pan n’est pas tant l’enfant qui refuse de grandir qu’un enfant abandonné et oublié par sa mère.

Il ne peut grandir car il a symboliquement été remplacé par sa mère par un autre petit garçon.

Il ne peut donc mourir puisque tout se passe comme s’il n’était pas né, ni grandir puisqu’il n’existe pas réellement.

David Copperfield ou le Petit Chose sont d’autres exemples d’enfants qui apprivoisent le monde par l’imaginaire ou le jeu avec la réalité ».


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Dans ses nombreuses pièces de théâtre, il idéalise avec mélancolie le monde de l’enfance et montre au contraire « une vue désillusionnée de la vie d’adulte ».

Ce désenchantement s’exprime souvent avec humour, par exemple dans « The admirable Crichton » où un valet devient roi d’une île déserte et où ses anciens employeurs deviennent ses servants ou ses administrés.


La plupart de ses œuvres eurent du succès : « Quality Street », « The Twelve-pound look », « The Will », « Dear Brutus ».

Son style est à l’image de sa vie : plein d’humour, de tendresse, mais aussi de cruauté. Comme l’a dit Bernard Shaw : « Barrie abrite l’enfer dans son âme ».


J.M.Barrie fut atteint, vers la fin de sa vie, de crampes douloureuses à la main qui l’obligèrent à écrire de la main gauche. Il dira en plaisantant : « Ce qu’écrit ma main gauche est plus sinistre que ce qu’écrivait ma main droite, plus rationnelle ».

Il mourut le 19 juin 1937 et fut enterré dans son village à Kirriemuir; sa maison natale a été transformée en musée.

D.GERARDIN