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L’ avenir de la littérature, F Badré
2003 par penvins

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Frédéric Badré est directeur de la revue Ligne de Risque, il défend ici un point de vue qui est donc celui de cette revue à la

Gallimard, 2003.

Frédéric Badré est directeur de la revue Ligne de Risque, il défend ici un point de vue qui est donc celui de cette revue à laquelle participent également François Meyronnis, Yannick Haenel et Philippe Sollers.

L’intérêt premier de ce livre qui ne prétend pas écrire une histoire de la littérature mais apporter un éclairage particulier sur le champ littéraire contemporain tient paradoxalement en ce qu’il trace assez clairement une histoire de la littérature française depuis l’effondrement de 1940. Cette mise en perspective – indispensable pour comprendre la littérature d’aujourd’hui il l’a fait et l’a fait à partir d’une classification difficilement contestable – qui comporte cependant des trous mais sans doute pas plus que n’en aurait n’importe qu’elle histoire de la littérature.

Le second intérêt réside bien sûr dans la défense et illustration de l’Axe du Néant l’ouvrage de F.Meyronnis.

La lecture que fait Badré de la littérature contemporaine est une lecture partisane, ce dont il ne se cache pas, qui prend pour première cible la littérature marchandise représentée par Houellebecq et Beigbeder, le second ayant l’avantage sur le premier d’être conscient de transformer le livre en produit.

Reste donc à redessiner un avenir de la littérature en commençant par prendre acte de ce qu’elle a été depuis que la défaite de 40 et l’effondrement qui a suivi. De ce point de vue nous ne pouvons qu’applaudir des deux mains. La meilleure des refondations est bien celle qui prend connaissance de ce sur quoi elle s’appuie.

Tout d’abord l’opposition de Sartre et du Nouveau roman, le premier appelant la littérature au secours d’une responsabilité collective, les seconds réinventés par Robbe-Grillet prônant une littérature du texte, situant désormais le romanesque dans l’espace ce qui lui permet d’échapper au temps et à la représentation.

Trois revues tiendront dans les années 50 trois discours différents sur la littérature, La Nouvelle NRF dirigée par Jean Paulhan et Marcel Arland, les Lettres Nouvelles dirigées par Maurice Nadeau et La Parisienne dirigée par Jacques Laurent, les orientations de ces trois revues doivent beaucoup à l’attitude que chacune d’elle a choisi d’adopter par rapport à la collaboration, la première restant comme avant-guerre ouverte à tous les courants de pensée, la seconde se fermant aux écrivains inscrits sur les listes noires et la troisième refusant toute sorte d’engagement.

La question centrale sera donc celle du Mal. Appelant à la rescousse - à la suite de J. Paulhan - Sade et Lautréamont, F. Badré y lit une nouvelle logique face à l’emprise de la mort, la liberté est à ce prix : Dans le stoïcisme heureux de Juliette, délivrée de la névrose, la mort n’est rien.

La littérature dont se démarque Ligne de risque sera donc d’abord celle de Maurice Blanchot. F.Badré retrace l’itinéraire de M Blanchot depuis son maréchalisme jusqu’à son engagement anonyme contre le gaullisme de 68, pour souligner que ce qui le hante c’est le désastre national. Tout la pensée de Blanchot est essentiellement mortifère. […] Au contraire de Drieu la Rochelle par exemple, qui ne peut qu’en exhiber les symptômes jusqu’à la mise en scène de son suicide, Blanchot lui donne la force d’une spiritualité négative hors du commun.

Un autre écueil  serait celui qui ferait de Drieu un mythe littéraire, cette voie-là est également insoutenable. Lui qui n’a eu aucun succès dans les années 30 alors que l’on lisait, Mauriac, Malraux, Montherlant, Morand et Bernanos, serait celui qui aurait le plus de succès aujourd’hui : Il n’y a pas de vrai désir en France pour la Résistance et ses héros. En revanche, le collabo motivé par une haine de soi, qui se suicide lors du naufrage de ses idées, on trouve cela magnifique. Hormis bien sûr l’apologie d’idées qui ont conduit là on l’on sait ne pourrait-on rappeler à M Badré qu’il y a pourtant plus à apprendre de ses erreurs que de l’apologie des héros et des martyrs.

Parce que si F. Badré prend tant de soin à mettre hors jeu cette littérature qualifiée de mortifère – ce en quoi on peut bien sûr être d’accord avec lui – c’est surtout pour mettre en valeur une littérature qui s’approprie systématiquement tout ce qui est nouveau, subversif, vivant, la littérature de Tel Quel.

Le désastre hexagonal (sic) cherche sa représentation. Cette représentation viendra de Céline, Roger Nimier organisant en 1957 le succès D’un château l’autre, le seul livre qui montre ce qu’était réellement Vichy. Sollers apparaît aux yeux de F.Badré comme le découvreur de Céline, après quoi il peut faire  le panégyrique de la seule revue qui ait compté après l’essoufflement du Nouveau Roman, Tel Quel.

Les arguments de F. Badré sont tout à fait recevables, pour tout dire je les partage sur beaucoup de points, on comprend aussi facilement que pour se faire entendre une revue se doit de défendre ses idées, ce qui reste tout de même difficile à avaler c’est cette suffisance qui lui fait considérer à l’instar de Meyronnis décrit ici comme un écrivain qui méprise les autres écrivains (je n’invente rien, il s’agirait même d’une qualité !) que toute autre littérature que Révolutionnaire est négligeable.

Bien sûr :Tout écrivain sort de la langue maternelle. Il exerce son pouvoir d’effraction dans le langage. C’est évidemment du côté de l’esthétique et du travail de la langue que ça se passe, mais les écrivains de Ligne de risque seraient-ils les seuls à s’en être aperçu ? Ch. Dedet écrit à propos de Tel Quel dans son journal des années 60 : Si ces types réussissent, ils sont capables de tout stériliser, il y a dans l’aventure de Ligne de risque une volonté de refondation de la littérature, le roman de Y. Haenel Introduction à la mort française était certes une réussite, mais l’avenir est multiple et reste encore à écrire, ne laissons pas la littérature s’enfermer à nouveau dans la théorie.

Penvins

23/02/2004

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