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Verre Cassé

Alain Mabanckou, Editions du Seuil, 2005

dimanche 19 juin 2005 par Alice Granger

Ce roman de l’écrivain africain Alain Mabanckou (Congo-Brazzaville) va infiniment plus loin qu’un simple « portrait vivant et savoureux d’une autre réalité africaine » comme c’est écrit sur la quatrième de couverture.

D’une manière métaphorique, il écrit une autre réalité humaine, celle qui commence avec la coupure du cordon ombilical, ici symbolisée par la mort de la mère du narrateur Verre Cassé qui écrit sur un cahier donné par L’Escargot entêté, le patron d’un drôle de bar nommé « Crédit a voyagé » où se retrouvent des éclopés de la vie.

Verre Cassé est investi d’une mission par L’escargot entêté, écrire dans ce cahier la vie chaotique et sans solution d’une poignée de vaincus de la vie dans une Afrique où il ne faut pas compter sur les politiques (tous corrompus) pour trouver un remède au mal qui les a atteints, où les femmes semblent encore là pour faire empirer les choses, où les intellectuels ne sont pas dans la réalité, où avoir fait la France donne une sorte de supériorité que l’auteur fait passer par la moulinette de son ironie, exercice dans lequel il excelle, et où avoir fait l’Amérique on n’en parle pas ...

L’Afrique semble donc symbolisée par cette disparition mystérieuse de la mère du narrateur Verre Cassé, nom lui-même métaphorique, celui de quelqu’un qui ne peut plus boire puisque le récipient est cassé, puisque l’intérieur matriciel et son liquide amniotique ont disparu. La mère s’en est allée en s’avançant dans le fleuve poussée par une force invisible pour rejoindre le père mort, il ne reste rien pour maintenir le narrateur, qui pourtant n’en finit pas de boire ses bouteilles de vin au bar du « Crédit a voyagé », dans une eau amniotique africaine. Il ne reste pas la mère, qu’il n’en finit jamais d’aimer, qui est encore présente pour lui, parce que cette mère n’est pas assurée par le père, alors elle se noie dans le fleuve tranquille et s’en va à jamais, elle retourne dans une sorte de temps antérieur.

Pourtant, Verre Cassé continue à boire, son alcoolisme lui a valu une lente destruction de tout ce qui faisait une vie normale, il perd son emploi d’enseignant, il perd sa femme qu’il nomme Diabolique, en fait il semble boire pour trouver la soif, non pas pour l’apaiser.

Il boit pour sentir, littéralement, cette destruction irrémédiable, dont la métaphore semble être cette Afrique que rien ne protège d’une inéluctable décomposition, surtout pas ses politiques, de même qu’un placenta se décompose à la naissance. Il boit ses bouteilles de vin, et cela se désorganise de plus en plus, comme l’Afrique.

De plus en plus, il prend acte de cette autre réalité, celle de la décomposition du commencement, la décomposition placentaire, et rien, aucun père, pour arrêter ça, au contraire, la mère, c’est le père disparu qui l’entraîne au pays d’autrefois. Verre Cassé semble n’en plus finir de vouloir sentir ça, cette réalité là, sans solution, se laisser aller à cette réalité-là d’un fleuve d’autrefois qui emmène à la destruction une vie d’avant, métaphore d’une Afrique d’avant.

Il boit comme se laisser aller avec le fleuve de la destruction, façon de garder encore présente sa mère, mais telle qu’elle est en train de s’en aller irrémédiablement, de se séparer. Sa mère c’est la sensation quasiment matérielle de cette séparation, et il s’accroche à cette séparation.

Mais s’il est à ce point en état d’addiction, c’est aussi pour autre chose. C’est que le narrateur est en état d’addiction par rapport à la littérature, qui a d’ailleurs commencé par la BD. Depuis sa jeunesse, il n’a cessé de littéralement boire les livres, qui l’ont fait voyager partout sans avoir besoin de quitter son pays natal.

Ces livres, qui font de lui plus qu’un boulimique de la lecture, qui font de lui une sorte d’alcoolique de la lecture qui ne peut résister à une bouteille livre de plus qui le fait tellement voyager ailleurs dans tous les pays, qui le fait être une suite infinie de héros différents, sont une métaphore du ventre maternel avec son liquide amniotique qui le fait voyager à crédit comme quelqu’un d’autre parle de mort à crédit. Son goût de la lecture a commencé pendant l’enfance, quand il était seul avec sa mère.

Mais, comme le nom du bar l’indique, c’est aussi le crédit qui a voyagé, c’est-à-dire, semble-t-il, le crédit accordé à un endroit matriciel qui serait éternel alors que la réalité affirme le contraire, ce n’est pas éternel, à un certain moment ça se décompose comme l’Afrique. Verre Cassé est bien placé pour en savoir long sur cette réalité-là de la décomposition en acte sans personne pour l’enrayer, pourtant il a encore un problème, il croit qu’il peut s’attarder à s’enivrer du liquide amniotique, les bouteilles sont encore livrées au bar du « Crédit a voyagé » en grand nombre, il boit comme s’il n’avait pas encore trouvé la soif, il boit comme il lit, parce qu’il est littéralement emmené dans le ventre des œuvres d’écrivains qui le retiennent ailleurs, qui lui permettent d’entretenir la croyance en un autre monde (symbolisé par exemple par la France) en deçà de la réalité cruelle de la séparation. Même si Verre Cassé, en même temps, ne se prive pas d’ironiser sur la fausse littérature, les faux intellectuels, sur toutes ces productions qui encombrent les librairies.

La mère de Verre Cassé l’a abandonné en partant se noyer dans le fleuve pour rejoindre le père mort, sa femme Diabolique l’a laissé à ses bouteilles de vin, la femme de l’homme aux Pampers (autre personnage habitué du bar « Crédit a voyagé ») l’a aussi abandonné pour aller avec le gourou d’une secte, le pauvre homme connaît la prison, la sodomie qui y règne, son corps est pénétré de toutes parts et ça le perce littéralement de sorte qu’il est obligé de mettre comme un nourrisson des couches pour contenir ce corps qui se liquéfie. Bref, il y a ces personnages féminins qui abandonnent, qui font apparaître cruellement la réalité de la séparation, et en même temps, elles restent, à la fin, comme désirables. Mais à ce moment-là, peut-être ne sont-elles plus des réitérations impossibles de la mère, et Robinette désire que Verre Cassé, qui n’a plus eu de femme depuis que Diabolique l’a quitté, lui offre une bouteille...Toujours la mère...et les femmes, dans ce roman, et ainsi, L’Escargot entêté n’est pas marié, « il dit souvent qu’il s’est marié à vie avec le ‘Crédit a voyagé’ », montant de temps en temps avec des femmes là-haut dans les chambres, oui, et avant ce bar, il avait sillonné l’Angola, le Gabon, le Tchad, parce qu’il avait toujours voulu être un homme d’affaires et n’avoir de comptes à rendre à personne, surtout pas fonder de famille, femme et enfants. A travers son personnage, ne devine-t-on pas la figure d’un père parti ?

Très amusante, cette partie à celui qui urine le plus, le plus loin et le plus longtemps entre Casimir le vantard, qui mène la grande vie et Robinette que le patron destinait à Verre Cassé. Devant lui, Robinette ôte sa chemise de pagne , « il faut dire honnêtement que ce spectacle était de loin celui d’une Margot qui dégrafait son corsage », « il portait un vieux slip rouge tomate qu’il a baissé jusqu’aux chevilles, et on a découvert son sexe, une particule élémentaire qui nous a fait éclaté de rire », et les urines de Robinette « tombaient plus loin alors que celles de son prétentieux concurrent sortaient par petits bonds de bébé kangourou, de grenouille qui veut devenir plus grosse qu’un bœuf »... « cela amusait Robinette qui ne put s’empêcher de lui lancer ‘pisse, pisse donc, nullard, c’est comme ça que tu vas me sauter, hein, nullard », et alors.... « nous avons constaté que sa particule élémentaire avait doublé, voire triplé de dimension au point que nous nous sommes frottés les yeux en signe d’incrédulité, et ses bourses tout d’un coup gonflées pendouillaient comme deux vieilles gourdes pleines de vin de palme », ... « Casimir qui mène la grande vie opérait un tournant décisif, un miracle qui méritait une béatification papale »..., et il dessine avec ses urines, avec talent, « la carte de France, ses urines orthodoxes tombaient en plein cœur de la ville de Paris....et je peux aussi dessiner la carte de Chine et pisser dans une rue précise de Pékin....Robinette ne comprenait plus rien...Casimir le Géographe...c’était la première fois qu’on la voyait capituler »...

L’Imprimeur est un autre personnage qui désire entrer dans le cahier, il fait partie de ceux « qui étaient persuadés que leur histoire était la plus extraordinaire de la terre, la plus biscornue,....ils veulent vous démontrer que celle qu’ils ont à vous raconter est aussi grave et sérieuse que la peine capitale...je suis le plus important de ces gars parce que j’ai fait la France...la France était pour lui l’unité de mesure, y mettre les pieds c’était s’élever au rang de ceux qui ont toujours raison...je ne hais pas les Français et les Françaises, mais je hais une Française et une seule...ses traits se sont durcis comme un gorille qui aperçoit un braconnier traverser son territoire...je vais te parler d’une femme, tu vas voir comment elle m’a tué, comment elle m’a ruiné, comment elle m’a réduit en déchet non recyclable...il ne faut pas badiner avec la femme blanche, je te dis que si tu croises une Blanche un jour, passe ton chemin, ne la regarde surtout pas, elle est capable de tout...ma vraie place c’est l’Europe, c’est la France...je travaillais dans une grande imprimerie de la banlieue parisienne...Céline...notre mariage tenait le coup...et puis un jour notre beau ciel bleu s’est assombri,...a resurgi cette histoire avec mon premier fils que j’avais eu avec une Antillaise...je n’allais pas céder la priorité aux Africains pour qu’ils viennent labourer ma femme sur mon propre baisodrome...tu ne vas pas me croire j’ai vu Céline avec mon fils dans le lit...j’ai poussé sur le champ le cri des oiseaux fous...j’étais dans une maison de fous...des piqûres...ma femme a demandé le divorce avec le conseil d’un avocat africain natif de notre pays...elle a obtenu surtout qu’on me rapatrie... », pourtant « c’est pas n’importe quel imbécile qui peut faire la France »...

La question qui semble traverser ce très beau roman serait que cet écrivain africain de génie s’aperçoit, mais ne le fait advenir dans son texte qu’en conclusion, comme un coup de théâtre, que la décomposition de l’abri matriciel, que ce qui en Afrique s’écrit comme désertification, appauvrissement, horizon bouché, pollution par les modes de vies et les perversions occidentales, pourrissement, ce n’est pas propre à l’Afrique. Le narrateur, alcoolique de lectures, s’il est parti pour toute sa vie dans la croyance nourrie dès l’enfance par ses livres qu’ailleurs c’est jamais décomposé, c’est toujours un abri, un crédit qui voyage, c’est la France mais encore plus l’Amérique, puisque la France dans la post-colonisation a laissé quand même tomber donc n’a plus laissé croire à la non destruction, un beau jour lorsqu’il est déjà assez vieux il s’aperçoit qu’ailleurs aussi l’abri se détruit, faisant apparaître un climat de la naissance cruel, froid, neigeux comme en Afrique c’est la désertification.

En effet, à la fin du roman, apparaît dans le bar « Crédit a voyagé » un homme nouveau, bizarre, venu d’Amérique, et qui interpelle Verre Cassé parce qu’il s’aperçoit qu’il ne l’a pas mis dans son cahier, il n’a pas parlé de lui. Cet homme, qui s’appelle Holden, qui vient d’Amérique comme d’autres ont fait la France, lui pose une question insistante, qui revient sans cesse, qui le poursuit, comme si Verre Cassé ne pouvait pas espérer lui échapper. Cette question est : qu’advient-il « aux pauvres canards des pays froids lorsque tombe l’hiver », « est-ce qu’on les enferme dans un parc zoologique, est-ce qu’ils émigrent vers d’autres contrées ou bien les pauvres canards se retrouvent coincés dans la neige ». En somme, là-bas aussi, en France, ou en Amérique, cela se décompose, le cordon ombilical se coupe, l’abri est détruit, un drôle de climat très cruel nommé hiver, avec sa neige, s’abat sur les canards qui se sont attardés à croire à l’immortalité de cet abri, de même que le narrateur lisait à s’en rendre aveugle des livres rimant avec « Crédit a voyagé », s’éternisant dans le voyage à crédit, sans jamais payer c’est-à-dire sans jamais admettre la réalité de la coupure originaire, sans jamais admettre que cela lui coûte une croyance, et, par conséquent, une bouteille à payer à Robinette, c’est-à-dire un autre regard, lorsqu’il n’est plus retenu par son amour de la mère.

Verre Cassé, le narrateur, peut-il encore voyager à crédit dans les livres, et en France et en Amérique, si, comme un imprudent canard, il peut s’y faire prendre lorsque tombe la neige cruelle ?

C’est pour cela qu’Alain Mabanckou s’est mis à écrire autrement, en inventant une autre écriture qui tranche avec l’écriture africaine, une écriture toute d’ironie, qui fait entrer cette réalité cruelle, qui joue avec cette addiction au cœur de chaque addiction, celle à la mère, tandis que l’Afrique, dans cette lecture-écriture qu’il en fait, est cette mère qui s’en va irrémédiablement alors que le père est déjà parti. Cette addiction à la mère concerne chaque humain, alors ce livre d’Alain Mabanckou nous envoie à tous depuis l’Afrique un message très dérangeant et pourtant très vivifiant.

Alors, bien sûr il faut parler du style d’Alain Mabanckou, de cette écriture sans points, juste des virgules, comme un long fleuve, sans commencement ni fin, les mots comme ils viennent, sûrement très travaillé mais semblant être l’écriture de quelqu’un qui ne cherche pas à faire l’écrivain, et pourtant une sorte d’addiction aux livres fait revenir sans fin des titres de livres, des références à des lectures, encore et encore, une culture surtout occidentale s’insinuant en permanence au rythme sans coupure de fil de cette écriture dans le cahier offert par L’Escargot entêté patron du « Crédit a voyagé », cet escargot si lent pour trouver la voie si rapide vers la sortie, vers la coupure du cordon ombilical. Presque à la fin, L’Escargot entêté dit à Verre Cassé qu’il n’a pas encore fini sa mission, qu’il reste encore quelques pages vierges dans le cahier. Et Verre Cassé, on sent qu’il doit répondre à la question sur les canards lorsque l’hiver et la neige arrivent...

Quelques exemples du style extraordinaire d’Alain Mabanckou :

« ...à l’ombre des jeunes filles en fleurs comme les aimait le type aux Pampers du temps où il n’était pas encore une loque qui suinte du fessier....il n’y a eu aucune jeune fille en fleurs qui a voulu de moi.. »

« ...ce type au visage bouffi qui vient paraît-il d’Amérique, qui prétend se nommer Holden, qui se préoccupe du sort des canards en hiver, qui me traite de dépassé, de vieillard...et voilà à présent Robinette qui s’y met à son tour, c’est quoi cette malédiction...est-ce que tu m’as déjà offert même une bouteille, une petite bouteille de vin, hein, non, jamais, tu n’es qu’un pingre, un égoïste, un branleur, tu m’as jamais d’ailleurs regardée, tu me détestes comme la peste....les bras m’en tombent, je la regarde dans les yeux et je dis ‘prends une bouteille, je vais payer, ce jour est important pour moi’, et, à ma grande surprise, elle refuse, ‘non, non et non, tu me prends pour qui, pour une mendiante, pour une pauvre, tu es qui pour me dire ça.... »

« ...elle me fatigue avec ses attaques gratuites, j’ai toutes les batteries à plat, je ne me vois pas la grimper, c’est plus mon truc, moi l’homme au désir d’amour lointain, et donc je tourne en rond, je veux aller prendre l’air le long de l’avenue de l’Indépendance avant de me barrer à minuit »

« ...je me retrouve en face de L’Escargot entêté, ‘où vas-tu mon gars’ me dit-il, je ne réponds pas, il me retient par la main droite, il me demande comment les choses se passent avec Robinette, je reste silencieux, je lui tends le cahier, il le prend, je veux l’arracher aussitôt de ses mains, je ne veux plus le lui donner maintenant... »

« ...c’est vraiment le désordre dans ce cahier, y a pas de points, y a que des virgules et des virgules, parfois des guillemets quand les gens parlent, c’est pas normal, tu dois mettre tout ça au propre...comment moi je peux lire tout ça si c’est collé comme ça, faut laisser quelques espaces, quelques respirations, quelques moments de pause, tu vois, j’attendais quand même mieux de toi, je suis un peu déçu, ta mission n’est pas encore terminée, tu dois recommencer »

« ...j’irai rejoindre ma mère afin de boire, de boire encore ces eaux qui ont emporté la seule femme de ma vie...elle était ma mère, elle était la femme la plus belle de la terre... »
Alors, bien sûr, à cause de cette addiction à la mère, L’Escargot entêté a toutes les peines du monde à faire entrer Robinette dans la réalité de Verre Cassé ! C’est le malentendu entre les sexes et la question si complexe de la différence sexuelle qui est traitée dans ce livre... Il y a à parier que si Verre Cassé sait répondre à la question de savoir que deviennent les canards quand arrive l’hiver, alors Robinette aura plus de chance...

Verre Cassé évoque son enfance : sa mère « ...elle me raconterait mon enfance...elle me dirait comment elle m’avait élevé seule...en ce temps-là je ne voulais pas grandir...durant ma jeunesse je regardais chaque chose avec curiosité, je ne redoutais pas ces légendes selon lesquelles notre étendue marine était habitée par des créatures mi-femme mi-poisson...la mer s’élançait à perte de vue tandis que les cormorans venaient se poser sur la grève, les ailes alourdies par l’errance...il n’y avait pas de voix paternelle...dans quelques instants je vais enfin être seul en face de ma mère...à minuit pile, je vais plonger dans les profondeurs de ces eaux étroites, il me suffira de passer le pont... »

Et Holden qui lui dit : « t’es pas sympa, tu n’aimes pas les canards...parce que tu ne peux t’imaginer le sort qui est réservé à ces pauvres bêtes »
« tchao mon bonhomme, je dois me barrer, ma place est au paradis...si quelques anges de mauvaise foi me racontent des salades là-haut pour m’empêcher d’y accéder par la grande porte, eh bien, crois-moi, j’y entrerai quand même par la fenêtre » ...Alain Mabanckou entre par la grande porte au paradis des écrivains...

Et encore :
« ...ils veulent qu’on ne parle que de leur nombril gros comme une orange mécanique... », « ...le prix Nobel ils vont catégoriquement le refuser parce qu’ils n’ont pas les mains sales, parce que le Nobel de littérature c’est l’engrenage, c’est le mur... », « ...j’écrirais des choses qui ressembleraient à la vie, mais je les dirais avec des mots à moi, des mots tordus, des mots décousus, des mots sans queue ni tête, j’écrirais comme les mots me viendraient, je commencerais maladroitement et je finirais maladroitement comme j’avais commencé, je m’en foutrais de la raison pure, de la méthode, de la phonétique, de la prose,...et les mots pour le dire ne viendraient pas aisément, ce serait où l’écriture ou la vie, c’est ça, et je voudrais surtout qu’en me lisant on dise ‘c’est quoi ce bazar, ce souk, ce cafouillis, ce conglomérat de barbarismes, cet empire des signes...je laissais l’écriture à ceux qui rappellent que trop de soleil tue l’amour... »

« ...qu’on ne vienne pas me dire que je galérais, que je m’ennuyais, que je regrettais le départ de Diabolique, que je couvais de l’aigreur, que j’allais écrire une lettre à l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, que j’allais réclamer pour mon mal un protocole compassionnel »

« ...je suis conscient que ma vie sexuelle, c’est un peu le désert des Tartares, y a rien devant, y a rien derrière..."

A propos de Diabolique : « ...je devais choisir entre elle et l’alcool, c’était un choix très cornélien....elle aurait souhaité ma mort rapide et soudaine à la place de cette mort à crédit qui la faisait bien plus souffrir... »

« ...la Cantatrice chauve, elle vend des soles grillées... »

Un roman superbe !

Alice Granger Guitard

Messages

  • Cette lecture de verre cassé paraît bien intéressante, mais il faut dire que l’étymon du style d’un auteur ne réside pas dans la juxtaposition des segments narratifs ou si vous voulez dans le choix des frangments des texte qui vous sembles plus importants, au risque d’exumer le vraisemblable critique remis en cause par Roland BARTHES dans (Critique et Vérité). Il est, bien sûr, possible de retrouver l’intérêt d’une analyse concentrée dans un stylème, mais la sélection pourrait dissimuler des subterfuges. Il serait de fait plus enrichissant par exemple de signifier ce qu’il ya d’extraordinaire dans les fragments présentés en lieu et exigence de les brandir sourdement. En d’autres termes, vous auriez dû montrer comment l’extraodinaire se manifeste scripturairement dans l’oeuvre de Mabanckou.

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