Le regard de l’icône
mercredi 8 juin 2005 par Yvette Reynaud-Kherlakian

L’efficacité religieuse, et esthétique, de l’icône byzantine - débarrassée qu’elle est des mignardises comme du vérisme de la représentation - tient à ce qu’elle donne peu à regarder afin de débroussailler le perçu et assurer la rectitude du regard. Le Pantocrator, l’anachorète à longs poils, Saint Georges terrassant le dragon appartiennent à un répertoire limité et codifié où chaque figure reproduit à l’infini une attitude, un geste d’une essence toute spirituelle comme authentifiée par la luminosité étale du fond d’or. La large trouée des yeux noirs dédaigne les épanchements de la psyché tout autant que la perception frivole ; elle est ouverte au seul passage de l’esprit qui tient le regard, le tend au loin, toujours plus loin vers un horizon invisible mais certain, là où le fond d’or de l’image délivre enfin sa promesse d’éternité. Ce regard-là doit orienter d’autres regards... Attente. Vigilance.

La contemplation de l’icône reste un exercice d’orthoptie même pour qui - comme moi - ne retient du message judéo-chrétien que la puissance suggestive de ses mythes.

Yvette Reynaud-Kherlakian

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