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Les sirènes de Bagdad - Yasmina Khadra
samedi 16 avril 2011 par Jean Leclerc

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Un kamikaze de porcelaine
Depuis des générations immémoriales, des gens dans un village aux confins du désert irakien vivent reclus loin des conséquences de la guerre dans leur pays. Un endroit où ses habitants, les jeunes en particulier, sans instruction, sans emploi, sans espoir face à l’avenir, vivotent dans la misère et la pauvreté. Enracinés dans des pratiques religieuses ancestrales, ils substituent les mythiques chants des sirènes par des berceuses aux versets coraniques. Des ouï-dire sur le conflit armé provoquent quelques vives discussions sans toutefois troubler le climat moribond des lieux. Puis, subitement, ils deviennent les témoins d’horreurs et les victimes de ces hostilités lorsque des soldats américains les attaquent tuant des femmes, des enfants, des vieillards, mais épargnant curieusement les mâles dans la vingtaine. Durant la même période, devant le téléviseur du café, les jeunes écoutent comme la trame musicale d’un film les cris des sirènes, des ambulances et assistent en téléspectateur à la guerre, aux actions terroristes, aux étalages des ignominies, des déshonneurs faits à leur peuple. Les jeunes gens en colère découvrent alors un sens à leur existence sur la terre. Nous sommes la colère de Dieu […] nous allons reconduire ces démons en enfer […] Dorénavant, laver par le sang les affronts devient un passage obligé et on se retrouve dans une délire collectif, un terreau de fanatisme pour le recrutement de Kamikazes et de poseurs de bombes. L’un d’eux, le narrateur anonyme du roman, se voit alors confier la mission finale aux conséquences mille fois plus percutantes que les attentats du 11septembre. Dans ce tunnel de folie meurtrière, quelqu’un verra-t-il, avant qu’il ne soit trop tard, une lumière au bout pour sauver l’humanité ?

Dans ce roman, contrairement à leurs réputations, les kamikazes ne ressemblent en rien à des psychopathes. Ces apprentis kamikazes sont des humains perdus, à la recherche d’une identité, brisés par la vie, découragés, ils auraient voulu se libérer de la pauvreté et de leur vie misérable. Tous endoctrinés par des valeurs islamiques, on trouve chez le personnage central l’incohérence des uns, le dilemme des autres et les confusions intérieures de la plupart d’entre-deux. Cet ex-étudiant universitaire se décrit comme un individu hypersensible à la souffrance des autres, ayant horreur de la violence. J’étais ainsi […] Un être de porcelaine] À l’opposé, il demeure enraciné psychologiquement à l’islam et à son incontournable vengeance par le sang. Alors, il se livre une guerre à lui-même en se cramponnant à ses croyances religieuses jusqu’à nier, à désavouer et à ignorer cette seconde partie de lui-même qu’il identifie comme une toxine dans son cerveau. À la fin dans une progression de tension, le héros en prenant une décision déconcertante propage sa confusion chez le lecteur.

Tout au long du roman, l’auteur démontre sa capacité de créer une ambiance. Tel un diaporama, il use de nombreuses figures de style pour imager et atténuer la lourdeur du récit. Il dissèque avec les mots les facettes, les enjeux entremêlés et expose, sans les nommer, ses aspects sains de même que ses métastases. Peut-être, un message d’espoir de guérison pour l’humanité. Un livre à lire et un auteur à découvrir.

Jean Leclerc

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