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Van Gogh / Gauguin
mardi 25 janvier 2005 par Philippe Nadouce

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Eléments de réflexions sur la nature des écrits biographiques consacrés à ces deux peintres.

Ce qui est frappant à la lecture des œuvres biographiques concernant ces deux hommes, c’est le caractère même de ces textes. Mis tous ensembles, ils reflètent la personnalité des deux artistes avec une vérité éblouissante pour quelqu’un qui voudrait écrire sur leurs deux mois de vie commune à Arles, en 1888.

Les textes sur Van Gogh font souvent appel au mysticisme, à la souffrance, à la profondeur et l’intériorité. Gauguin -pas grand chose à mettre sur la balance, si l’on compare la quantité et la qualité de la production littéraire qu’il a laissé- n’inspire que des reflexions sur « l’extériorité » et le symbolisme de l’homme s’élevant seul vers les cimes, sur un certain dandisme ; son esthétique, sa puissance, son fameux « j’ai voulu vouloir », etc. Lui qui considérait le francais parlé de Van Gogh avec circonspection n’avait qu’un style de garçon boucher comparé à celui-ci. Ce qu’il pouvait saisir de sa propre vie intérieure était assez affligeant, il faut bien le dire, comparée au pouvoir d’introspection de Vincent. Un Vincent qui, faisait remarquer Artaud -le paradoxe est effrayant-, avait lui, « une tête de boucher » [1] . Un silène inversé, dont la beauté, la lumière noire, n’apparut qu’à de brefs instants au regard formaté de Gauguin. Vincent, d’ailleurs l’avait bien remarqué quand il écrivait à son frère que « l’Incas » le prenait pour un demeuré... Tout à fait Gauguin de ne rechercher que des signes visibles de supériorité chez l’autre et de se poser là quand il n’en trouvait pas. Une telle incapacité à tisser des relations n’allant jamais au-delà des rapports primitifs de masculinité l’empêchait de voir une intelligence supérieure à la sienne faire allégeance, se dépouiller de toute volonté dominatrice pour lui concéder ce qu’il voulait.

Gauguin, comme le fait encore remarquer Artaud, ne « pensait qu’à rechercher le mythe, agrandir les choses de la vie jusqu’au mythe alors que Van Gogh pensait qu’il faut déduire le mythe des choses les plus terre-à-terre de la vie ». L’unité des opposés, l’indication entre ces deux natures d’une « scission humaine de fond ». A cela, ajoutons les défauts de caractère des deux hommes ; une impatience irritante et autoritaire chez Van Gogh ; une humeur boudeuse et infantile chez Gauguin.... Des moments d’euphorie ou d’aboulie chez les deux. Un profond sentiment de culpabilité chez Vincent ; une épouvantable terreur vitale chez l’Incas. Cette idée fixe que la vie lui avait volé quelque chose, -un trône ?- dès son plus jeune âge. Cette volonté farouche de se payer coûte que coûte quand l’occasion se présentait. Gauguin, recroquevillé sur lui même, jurant les poings fermés de mener jusqu’au bout sa tâche surhumaine ; enfant colosse et nigaud, il lui fallait absolument avoir le dernier mot sur les hommes.

La vérité est que Van Gogh fut un véritable mystère pour lui. Il le rata complètement. Il aurait fallu qu’ils se revoient sur les rivages des Marquises, juste avant la mort de Paul ; c’est à ce moment là qu’il aurait pu le comprendre ou, du moins, l’accepter et l’admirer dans sa grandeur, jusqu’au délire.


[1Lire l’essai de Antonin Artaud : « Van gogh, le suicidé de la société ». 1947

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