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Sur cette terre, à nous prêtée... Les Chants de Nezahualcoyotl

Traduit du nahuatl et présenté par Pascal Coumes et Jean-Claude Caër, parution aux Editions Arfuyen

mardi 16 février 2010 par Françoise Urban-Menninger

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A l’instar des Psaumes du Roi David ou des fameux Fragments d’Héraclite, la voix de Nezahualcoyotl, le plus grand nom de la poésie précolombienne, nous parvient aujourd’hui telle "la seule voix vivante de ce monde aboli par les Conquistadores espagnols" écrit Le Clézio.

Nezahualcoyotl (1402-1472) naît au Royaume de Texcoco, près de Mexico. Son nom signifie "coyote affamé", il est déjà en soi prémonitoire de la quête initiatique et de la recherche d’absolu jamais assouvie du poète. Marqué par le meurtre de son père, le jeune homme se cachera plus de dix ans dans les montagnes avant de réapparaître en 1427 pour reconquérir Texcoco. Il devient roi en 1431 et réorganise son royaume en s’entourant d’artistes, de philosophes et de poètes.

Alors que son royaume est frappé par diverses calamités naturelles qui éprouvent le souverain jusque dans ses croyances, ce dernier se tourne vers le "dieu inconnu". Elevé au Collège des prêtres, Nezahualcoyotl s’est pénétré de la poésie de ses ancêtres toltèques et il s’adonnera toute sa vie à l’écriture. Il prophétise la ruine du monde aztèque et célèbre dans ses poèmes la beauté éphémère de toute chose, la grâce des fleurs, celle des femmes ou des oiseaux. "Revêts-toi des fleurs,/ des fleurs aux couleurs de l’ara des lacs"/ Brillantes comme le soleil", nous enjoint la voix vibrante de Nezahualcoyotl. Mais il a toujours soin d’ajouter "Pare-toi, ici sur la terre,/ seulement ici".

Ce "ici" revient telle une plainte, un soupir déjà résigné ; "ici sur la terre" est repris par opposition à "ce là-bas" où sont "les Décharnés". Tout le livre du poète balance entre ce "ici" et ce " là-bas". La lumière éblouissante jaillit de la faille où la grâce et la beauté nous envahissent mais "pour un bref instant seulement".

Le chant de Nezahualcoyotl est d’une beauté tragique, désespérée qui confine à l’absolu car dans l’instant où l’on danse, où l’on aspire au bonheur, l’on pressent inévitablement et paradoxalement notre fin car "Ici n’est pas notre maison". Notre condition humaine tient tout entière à l’unité fondamentale de la vie et de la mort. Seule la poésie permet d’appréhender l’éternité et l’immortalité. "Et si la mort jamais ne vient,/ Et si j’étais sûr de ne jamais disparaître ?".

Si le royaume de Nezahualcoyotl a sombré, il en reste pour toute dernière demeure sa parole toujours bien vivante qui nous traverse. "Ô vous qui m’écoutez, de mes chants, on gardera souvenir !" et le poète de s’écrier "Je suis poète et mon chant vivra sur la terre !".

Ce chant lumineux qui monte vers nous et nous élève vers les cimes est semblable à une source de vie jamais tarie et qui se régénère à chaque lecture. C’est "un arbre fleuri" qui jamais ne se fane car le poème de Nezahualcoyotl nous arrive dans un entre-deux où vie et mort ont partie liée.

"Mais faut-il vivre dans les pleurs ?" s’interroge le poète ...La réponse est dans ce recueil qui nous invite à pénétrer dans "La maison du printemps" où le poète va chantant ses "chants fleuris".

Françoise Urban-Menninger

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