Par soucis d’honnêteté, et afin de rendre mon propos le plus compréhensible possible (ou que la nuanciation se fasse a priori), je tiens à signaler que je n’ai jamais lu aucun roman de Houellebecq, et compte difficilement le faire tant par manque de temps (toute une série d’ouvrage sur l’histoire française à lire, pour le bien de mon avenir, parait-il) et, accessoirement, par manque flagrant d’envie.
Il faut distinguer, à mon sens, deux parties essentielles dans le phénomène qui entoure Houellebecq.
I : La médiatisation effective.
Premièrement, la médiatisation effective, celle qui, je dirais, est envoyé quoiqu’il arrive, sur les journaux, la télévision et les réseaux plus ou moins fermées. Elle prépare et dépend de la deuxième part, que j’appelle la médiatisation à la demande (bien que ces termes soient, je le reconnais, assez mal choisis, je ne peux en trouver de meilleurs). C’est un travail de l’éditeur, éditeur majoritairement décisionnaire, bref, un travail où l’auteur n’a normalement pas son mot à dire.
Je dis normalement parce que, dans le cas de Houellebecq, il est évident que l’auteur fait ingérence dans la stratégie marketing de son éditeur et je suppose que les contrats que le lient avec celui qui le publie sont bien spécifiques. A noter, sur ce fait, son transfert d’une maison d’édition à une autre pour une somme faramineuse (1 million d’euros, voire plus, il me semble). Ainsi, si certains auteurs subissent leur éditeur, il y a fort à parier que lui, bien au contraire, agit.
De cela découle le point central de la stratégie de vente et, à mon sens, le nœud agaçant du problème Houellebecq : le culte de la personnalité. Le terme est fort, mais il est approprié ; on en arrive à vendre plus un écrivain que le livre qu’il écrit et son seul nom est un moteur de ventes, quelque soit la qualité des textes.
On me répondra que, oui, effectivement, c’est peut être le cas mais que ça l’a de toute façon toujours été, essentiellement en regardant les manuels scolaires, abreuvés d’Hugo, Rimbaud et Verlaine pour ce qui est de la littérature, servis de Pascal (jusqu’à la terminale) puis de Kant (pour les classes préparatoires) simplement à cause de leur nom.
A quoi je réponds un oui-mais-non. Si ces auteurs classiques sont devenus tels (classiques, j’entends) c’est bien pour le fond de leur ouvrage (Kant n’a pas quitté sa ville de sa vie qu’on dit troublé uniquement par la lecture d’un texte de Rousseau, il a donc dû difficilement aller signer son contrat post mortem). Houellebecq, clone de Werber qui se joue du même phénomène sur un public relativement plus jeune (il construit, lui, surtout, sa cohorte de groupies dans les pré-25 ans), jouit d’une notoriété exclusivement appuyée par la polémique.
La polémique, défiée de tout talent. Je ne pose pas là la question de savoir si oui ou non Houellebecq est un grand écrivain ou un simple torchonniste, je ne peux en juger, puisque je n’ai pas lu ses livres, et je n’ai d’ailleurs aucune envie de le faire. Je pourrais pour Werber, mais là n’est pas le sujet. La polémique, donc. Car c’est le fond de commerce de cet homme.
Étrange, d’ailleurs, que la sortie de son livre soit soudain appuyée par une biographie très justement (entendre que cela tombe plutôt bien pour lui) non reconnue. Le Libération de cette fin de semaine nous signale que l’auteur s’est senti trahi par tous ses amis et que, triomphant de sa répugnance pour la chose, il décide d’esquisser une autobiographie sur son site internet. Une curieuse coïncidence. Oh, bien sûr, le biographe en question a sans doute profité de la sortie de La Possibilité d’une Ile, le dernier opus en date de Houellebecq, pour faire valoir son propre livre. Mais avouez que cela tombe tout aussi bien pour l’auteur qui, à nouveau, va faire jouer la polémique.
Polémique, encore, dans le milieu média-culturel (car, voyons les choses en face, les médias sont au grand public ce qui les critiques littéraires sont au public avisé), où on nous livre quelques autres auteurs de livres satellites autour du phénomène Houellebec (On a toute essayé, Vol de Nuit, ...), brassant de l’énergie et de l’argent. Un petit combat au dessus duquel plane le principal intéressé, en se réjouissant.
Une sur-médiatisation énervante, assurément. Finement orchestré, par un éditeur, par un auteur qui jouit d’un passé, et qui se base peu sur le texte (puisque, de toute façon, seuls les critiques supposés livrés un avis positif se sont vue envoyer le livre avant sa sortie dans les librairies, les autres ayant été fermement ignorés) et beaucoup sur le personnage.
C’est non sans ironie que j’aime à me souvenir que l’autre ouvrage qui jouit de tant de publicité, c’est outre manche pour le dernier Harry Potter.
II : Médiatisation à la demande
Mais il me faut pondérer mon propos. L’intelligentsia Houellbecq s’agite, certes, mais vraiment pas dans le vide. Une telle dépense (car il faut des sommes considérables pour s’assurer des journaux, magazines, campagnes publicitaires en tous genres) n’est pas envoyée au vent et sans certitude. Si à chaque sortie, l’auteur compte grignoter un peu plus de champ, il a tout son terroir assuré, derrière.
Car, finalement, Nothomb, Werber, Houellebecq (entre autres) surfent avec plus ou moins d’habilité sur le flou littéraire français. On a eu Queneau, Breton, Aragon, dans l’autre siècle, il n’y a pas si longtemps on a eu Maupassant, et puis Apollinaire, mais, maintenant, en 2005, de qui parlera-t-on dans une centaine d’années ? Qui faut-il considérer comme le penseur ? Sartre est mort dans les années 80, son existentialisme ne fait plus que des émules tardives, vivement critiquées par les quelques professeurs des préparatoires supposés former l’élite littéraire de demain.
Il y a donc une place essentielle à occuper, et chacun veut apparaitre comme controversé pour faire semblant d’avoir de grandes idées alors que, en bout de compte, que ça soit plaisant ou non à lire, les romans sont bien communs, bien redondants, et n’ont de portés philosophiques, de multiplicités littéraires (Queneau en poésie, théâtre, roman, philosophie) que celles supposées par leurs auteurs.
Le public cherche un nouveau phare, il demande une médiatisation, il demande à vibrer à travers des pages pour L’Auteur. Il demande à pourvoir dire, dans une cinquantaine d’années « Je me souviens des débuts de ... ». Alors le Média répond à cette demande, dans une logique de profits, c’est normal.
— -
Pour conclure de cette analyse incomplète, sommaire mais spontanée (c’est déjà ça), diaboliser Houellebecq, essentiellement pour sa médiatisation, serait, à mon sens, faire une erreur quoiqu’elle ne soit pas totale. Il s’agit ici de considérer le problème de son intégralité, et ne pas tomber dans le jeu de l’écrivain lui même, qui désire couper la foule des lecteurs en un débat manichéen, confortable et sujet à la polémique.
Par soucis d’honnêteté, et afin de rendre mon propos le plus compréhensible possible (ou que la nuanciation se fasse a priori), je tiens à signaler que je n’ai jamais lu aucun roman de Houellebecq, et compte difficilement le faire tant par manque de temps (toute une série d’ouvrage sur l’histoire française à lire, pour le bien de mon avenir, parait-il) et, accessoirement, par manque flagrant d’envie.
Il faut distinguer, à mon sens, deux parties essentielles dans le phénomène qui entoure Houellebecq.
I : La médiatisation effective.
Premièrement, la médiatisation effective, celle qui, je dirais, est envoyé quoiqu’il arrive, sur les journaux, la télévision et les réseaux plus ou moins fermées. Elle prépare et dépend de la deuxième part, que j’appelle la médiatisation à la demande (bien que ces termes soient, je le reconnais, assez mal choisis, je ne peux en trouver de meilleurs). C’est un travail de l’éditeur, éditeur majoritairement décisionnaire, bref, un travail où l’auteur n’a normalement pas son mot à dire.
Je dis normalement parce que, dans le cas de Houellebecq, il est évident que l’auteur fait ingérence dans la stratégie marketing de son éditeur et je suppose que les contrats que le lient avec celui qui le publie sont bien spécifiques. A noter, sur ce fait, son transfert d’une maison d’édition à une autre pour une somme faramineuse (1 million d’euros, voire plus, il me semble). Ainsi, si certains auteurs subissent leur éditeur, il y a fort à parier que lui, bien au contraire, agit.
De cela découle le point central de la stratégie de vente et, à mon sens, le nœud agaçant du problème Houellebecq : le culte de la personnalité. Le terme est fort, mais il est approprié ; on en arrive à vendre plus un écrivain que le livre qu’il écrit et son seul nom est un moteur de ventes, quelque soit la qualité des textes.
On me répondra que, oui, effectivement, c’est peut être le cas mais que ça l’a de toute façon toujours été, essentiellement en regardant les manuels scolaires, abreuvés d’Hugo, Rimbaud et Verlaine pour ce qui est de la littérature, servis de Pascal (jusqu’à la terminale) puis de Kant (pour les classes préparatoires) simplement à cause de leur nom.
A quoi je réponds un oui-mais-non. Si ces auteurs classiques sont devenus tels (classiques, j’entends) c’est bien pour le fond de leur ouvrage (Kant n’a pas quitté sa ville de sa vie qu’on dit troublé uniquement par la lecture d’un texte de Rousseau, il a donc dû difficilement aller signer son contrat post mortem). Houellebecq, clone de Werber qui se joue du même phénomène sur un public relativement plus jeune (il construit, lui, surtout, sa cohorte de groupies dans les pré-25 ans), jouit d’une notoriété exclusivement appuyée par la polémique.
La polémique, défiée de tout talent. Je ne pose pas là la question de savoir si oui ou non Houellebecq est un grand écrivain ou un simple torchonniste, je ne peux en juger, puisque je n’ai pas lu ses livres, et je n’ai d’ailleurs aucune envie de le faire. Je pourrais pour Werber, mais là n’est pas le sujet. La polémique, donc. Car c’est le fond de commerce de cet homme.
Étrange, d’ailleurs, que la sortie de son livre soit soudain appuyée par une biographie très justement (entendre que cela tombe plutôt bien pour lui) non reconnue. Le Libération de cette fin de semaine nous signale que l’auteur s’est senti trahi par tous ses amis et que, triomphant de sa répugnance pour la chose, il décide d’esquisser une autobiographie sur son site internet. Une curieuse coïncidence. Oh, bien sûr, le biographe en question a sans doute profité de la sortie de La Possibilité d’une Ile, le dernier opus en date de Houellebecq, pour faire valoir son propre livre. Mais avouez que cela tombe tout aussi bien pour l’auteur qui, à nouveau, va faire jouer la polémique.
Polémique, encore, dans le milieu média-culturel (car, voyons les choses en face, les médias sont au grand public ce qui les critiques littéraires sont au public avisé), où on nous livre quelques autres auteurs de livres satellites autour du phénomène Houellebec (On a toute essayé, Vol de Nuit, ...), brassant de l’énergie et de l’argent. Un petit combat au dessus duquel plane le principal intéressé, en se réjouissant.
Une sur-médiatisation énervante, assurément. Finement orchestré, par un éditeur, par un auteur qui jouit d’un passé, et qui se base peu sur le texte (puisque, de toute façon, seuls les critiques supposés livrés un avis positif se sont vue envoyer le livre avant sa sortie dans les librairies, les autres ayant été fermement ignorés) et beaucoup sur le personnage.
C’est non sans ironie que j’aime à me souvenir que l’autre ouvrage qui jouit de tant de publicité, c’est outre manche pour le dernier Harry Potter.
II : Médiatisation à la demande
Mais il me faut pondérer mon propos. L’intelligentsia Houellbecq s’agite, certes, mais vraiment pas dans le vide. Une telle dépense (car il faut des sommes considérables pour s’assurer des journaux, magazines, campagnes publicitaires en tous genres) n’est pas envoyée au vent et sans certitude. Si à chaque sortie, l’auteur compte grignoter un peu plus de champ, il a tout son terroir assuré, derrière.
Car, finalement, Nothomb, Werber, Houellebecq (entre autres) surfent avec plus ou moins d’habilité sur le flou littéraire français. On a eu Queneau, Breton, Aragon, dans l’autre siècle, il n’y a pas si longtemps on a eu Maupassant, et puis Apollinaire, mais, maintenant, en 2005, de qui parlera-t-on dans une centaine d’années ? Qui faut-il considérer comme le penseur ? Sartre est mort dans les années 80, son existentialisme ne fait plus que des émules tardives, vivement critiquées par les quelques professeurs des préparatoires supposés former l’élite littéraire de demain.
Il y a donc une place essentielle à occuper, et chacun veut apparaitre comme controversé pour faire semblant d’avoir de grandes idées alors que, en bout de compte, que ça soit plaisant ou non à lire, les romans sont bien communs, bien redondants, et n’ont de portés philosophiques, de multiplicités littéraires (Queneau en poésie, théâtre, roman, philosophie) que celles supposées par leurs auteurs.
Le public cherche un nouveau phare, il demande une médiatisation, il demande à vibrer à travers des pages pour L’Auteur. Il demande à pourvoir dire, dans une cinquantaine d’années « Je me souviens des débuts de ... ». Alors le Média répond à cette demande, dans une logique de profits, c’est normal.
— -
Pour conclure de cette analyse incomplète, sommaire mais spontanée (c’est déjà ça), diaboliser Houellebecq, essentiellement pour sa médiatisation, serait, à mon sens, faire une erreur quoiqu’elle ne soit pas totale. Il s’agit ici de considérer le problème de son intégralité, et ne pas tomber dans le jeu de l’écrivain lui même, qui désire couper la foule des lecteurs en un débat manichéen, confortable et sujet à la polémique.