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DILMI Athmane - interview
samedi 13 février 2021 par Abdelali Najah

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DILMI Athmane : Le Hirak dans le monde arabe, c’est le chaos total.

DILMI Athmane est un écrivain algérien de la deuxième génération d’écrivains algériens d’expression française, qui a débuté l’écriture tardivement, plus précisément au mois de novembre 2018, date dans laquelle il a commencé à écrire un recueil de contes intitulé « Les contes de ma mère » pour rendre hommage à sa mère - édité en janvier 2019. Ensuite, trois autres ouvrages ont été édités durant l’année 2019 et un cinquième a vu le jour en Avril 2020.
Dans cet entretien exclusif, DILMI Athmane nous livre son expérience avec l’écriture par le biais de son parcours littéraire, ainsi que ses réflexions personnelles sur la scène culturelle et politique en Algérie en particulier, et dans le monde arabe en général.

Présentation :

DILMI Athmane : - Je m’appelle DILMI Athmane, auteur algérien de contes, de fictions et de romans. Je suis âgé de 66 ans, né précisément le 20.9.1954 à Boufarik, une ville située à 35 kilomètres de la Capitale Alger. Je suis marié et père de quatre enfants, tous majeurs. Après des études secondaires, j’ai exercé dans l’éducation nationale en qualité d’enseignant francophone pendant quatre (04) années (de 1973 à 1977).
Juste au début de l’année scolaire 1977-1978, j’ai dû quitter le métier d’enseignant pour des considérations purement professionnelles, j’étais jeune et je trouvais ce métier lassant et non prometteur. Je me suis orienté vers la police où j’ai servi pendant vingt-huit (28) années, jusqu’à mon départ à la retraite à l’âge de 51 ans. J’ai préféré rendre le tablier et m’occuper de plus près de mes enfants.
Durant mes activités professionnelles, soit dans l’éducation nationale ou dans la police, j’ai connu des hommes de valeur, certains ne sont plus de ce monde et d’autres sont encore en vie.

Comment-peut-on être Commissaire de Police et écrivain ?

DILMI Athmane : -Le travail dans la police est un métier comme les autres. Rien n’empêche le fonctionnaire de police de se cultiver, de faire des études ou de s’adonner à des passions (sport, lecture, écriture et autres). Moi personnellement, j’avais la chance tout au début de ma carrière dans la police de côtoyer des jeunes policiers de mon âge qui, en plus des activités professionnelles, fréquentaient l’université en cours du soir, donc j’ai suivi la voie. Même en rejoignant le corps de la police, j’avais gardé des liens étroits avec mes amis enseignants en particulier et le monde de l’éducation nationale en général.
Le 01 Décembre 2005, je suis parti de mon plein gré à la retraite, fatigué de la décennie noire comme beaucoup de mes collègues. Au bout de quelques mois, l’activité m’a manqué ; j’ai rejoint aussitôt le secteur des assurances pour exercer une activité indépendante en qualité d’enquêteur au sein de l’Agence de lutte contre la fraude à l’assurance. Cette occupation a duré presque quinze années, jusqu’au mois d’Aout de l’année 2020.
Dans mon enfance, je rêvais d’exercer les métiers d’enseignant, d’inspecteur de police, d’écrivain et d’acteur de cinéma. Les trois premiers vœux ont été exaucés, mais celui d’acteur de cinéma est irréalisable ; toutefois un espoir demeure encore, celui de voir un jour l’un de mes romans adapté au cinéma ou à la télévision. Les passions de lire et d’écrire ne viennent pas du jour au lendemain, elles sont construites, à l’instar de la personnalité de l’individu, depuis la tendre enfance. Ma génération post indépendance avait connu les bibliothèques scolaires depuis le primaire ; au lycée nous avions deux séances par semaine pour le prêt des livres (sous la surveillance des profs de français).

Les œuvres littéraires :

DILMI Athmane : -Au mois de novembre 2018, j’ai décidé d’écrire un recueil de contes du terroir maghrébin que j’ai intitulé « Les contes de ma mère » pour rendre hommage à ma mère qui nous a légué des histoires qu’elle a héritées, elle aussi, de ses parents. J’ai adressé le manuscrit à la maison d’édition EDILIVRE laquelle n’a pas tardé en me répondant qu’il a été accepté par son comité de lecture. En janvier 2019, le modeste ouvrage a été édité. En tout, quatre (4) ouvrages ont été édités durant l’année 2019 et un cinquième a vu le jour en Avril 2020 auprès de cette maison d’édition. EDILIVRE est une maison d’édition permettant aux nouvelles plumes d’horizons divers de s’exprimer :
- Les Contes de ma mère : -Il s’agit d’un modeste recueil de contes du terroir maghrébin renfermant quelques histoires qu’aimait nous raconter ma chère mère pendant les nuits glaciales d’hiver. Pendant cette période, il y avait la guerre, la majorité de la population n’avait pas les moyens de distraction comme la télévision ou la radio. Nous n’avions même pas l’électricité. Les histoires narrées par ma mère concernaient le lion, le loup, le chacal et l’ogre.
- Le Rêve d’un imbécile exaucé :- L’histoire d’un jeune imbécile qui fait pour une fois un beau rêve. Il se voit partir chez son oncle maternel avec sa mère ; elle voulait le marier avec la fille de ce parent. Auparavant, la maman a rendu visite à plusieurs familles pour demander la main de leur fille, mais en vain. Dès qu’on constatait l’imbécillité du jeune homme, on la rabrouait. Elle décida alors d’aller voir un ermite vivant en compagnie de ses chèvres à proximité d’une montagne, il accepta de prendre en charge le jeune homme. Après sa guérison, le jeune homme retourna chez sa mère complètement guéri et complètement métamorphosé. Il participa à un concours organisé par le sultan. Ce dernier promit de marier sa fille unique à celui qui lui raconterait une histoire insolite. Les portes du Palais royal s’ouvrirent à notre bonhomme, il fut nommé Gouverneur, puis Conseiller du Sultan.
- Après la grisaille, l’éclaircie : - Il s’agit d’un modeste ouvrage retraçant les principales étapes de ma vie : ma naissance quarante jours avant le déclenchement de la guerre de libération nationale, la pauvreté de mes parents, ma scolarité, le décès de mon père, les souffrances de ma mère, mon travail d’enseignant, le changement d’activité sans omettre la décennie noire.
- Voyage dans le monde des djinns et de la sorcellerie : - J’ai abordé, dans ce petit ouvrage, l’existence du monde des djinns que le Coran cite dans plusieurs de ses versets. Même les deux autres grandes religions (le Christianisme et le Judaïsme) reconnaissent l’existence de ce monde mystique vivant en parallèle au monde des humains. Les djinns nous voient, nous observent, épient nos mouvements et gestes et peuvent nous nuire. J’ai abordé également la sorcellerie en tant que crime punissable par la loi, sachant bien que les sorciers ont recours aux djinns pour l’accomplissement de leurs abjectes actions.
- La dame au cœur au d’or :- J’ai soulevé le problème de la fugue des adolescents, plus particulièrement la fugue des jeunes filles. J’ai exposé l’histoire d’une jeune fille fuyant le domicile parental suite aux harcèlements quotidiens de sa marâtre, heureusement le destin a mis sur son chemin une brave dame.
Actuellement, je finalise un roman policier dont l’histoire est inspirée d’affaires réelles. Les principaux acteurs dans ces affaires criminelles sont issus de foyers désintégrés suite à des divorces suivis de remariages. Le manuscrit sera présenté à des maisons d’édition très prochainement.

La littérature en Algérie :

DILMI Athmane : -La littérature en Algérie n’a aucune particularité par rapport à la littérature dans les autres pays voisins de notre environnement (France et pays du Maghreb) surtout après l’avènement de la mondialisation. Le monde est devenu un village, ce qui se passe à Paris se répercute immédiatement à Alger, Rabat ou Tunis. Le monde de l’édition assure, de moins en moins, la publication des livres ; le lectorat fait défaut, surtout pour le livre papier. Dans les années 1960 et 1970, il y avait énormément de librairies dont les vitrines étaient achalandées. Les gens lisaient dans la rue, les transports, les jardins publics, les salles de spectacles partout ; malheureusement le livre papier a perdu ses adeptes parmi les jeunes, ces derniers préfèrent la nouvelle technologie. Les professionnels du livre dont les gérants de librairies ont vite transformé leurs activités au profit d’autres activités plus lucratives ( Fast Food etc ). Parlons des nouveaux auteurs, leurs œuvres ne sont éditées que rarement par les maisons d’édition qui, en majorité, relèvent du secteur privé. Pour des raisons purement commerciales, elles ne prennent pas de risques avec des auteurs non connus dans le paysage culturel et littéraire en particulier. Les nouvelles plumes, dont moi-même venu tardivement dans l’écriture, ont recours aux maisons d’édition étrangères pour voir leurs œuvres éditées, mais demeurant le plus souvent inconnues du lectorat, car les moyens pour les promouvoir sont inaccessibles (salons du livre, foires, publicité et autres).

La littérature algérienne d’expression française :

DILMI Athmane : -Au lendemain de l’indépendance, une panoplie d’auteurs a vu le jour. Leurs écrits se rapportaient à la colonisation, la pauvreté, la ségrégation, la soumission, les biens accaparés par les colons, l’analphabétisme, la guerre de libération nationale, l’émigration durant la colonisation et après l’indépendance. Il n’y avait pas de différence dans les thématiques de Féraoun, Dib, Mammeri, Kateb, tous relataient la mal-vie des algériens appelés de surcroit « indigènes » par les forces coloniales. A partir des années 1990, une autre génération d’écrivains a vu le jour : Sansal, Yasmina Khadra, Amin Zaoui, Kamel Daoud, Maissa Bey, Salim Bachi et autres ; cette catégorie d’auteurs a apporté un nouveau souffle à la littérature algérienne d’expression française en abordant des thématiques par de l’honneur, du malaise, du chaos, sans oublier celles se rapportant à l’amour, au mariage, au divorce et aux violences y compris celles résultant de la décennie noire en tant que tragédie nationale (littérature de l’urgence).

En tant qu’écrivain, que pensez-vous du Hirak en Algérie en particulier et dans le monde arabe en général ?

DILMI Athmane : -C’est une question pertinente à laquelle je n’aime pas répondre, mais j’ai un avis personnel qui est peut-être différent à celui de beaucoup d’autres. Depuis la révision de la Constitution par l’ancien pouvoir en utilisant l’ordonnance présidentielle pour ne pas passer par le référendum, dans laquelle il avait restauré la multiplicité des mandats présidentiels ; le peuple algérien avait rejeté cette démarche, mais est resté discipliné, craignant d’éventuelles dérives de la rue, car les violences de la décennie noire ne sont pas loin. Le troisième mandat est passé comme une lettre à la poste, le quatrième mandat a suivi malgré les grognements de certains, mais quant à la candidature au cinquième mandat, alors que le Président se trouvait malade et de surcroit hospitalisé depuis des mois en Suisse, elle a été rejetée par le peuple dans sa totalité. Sa sortie spontanément dans la rue a mis un frein à la candidature. Ce jour, le peuple n’avait qu’une seule revendication (Non au cinquième mandat) ce qui a été acquis. Dans les jours qui ont suivi, les acteurs de la mascarade du cinquième mandat et les auteurs de corruption ont été arrêtés et jugés. A mon avis, le Hirak a atteint son objectif, sauf que certains acteurs de dernière minute, sont entrés en jeu et ont commencé à scander des revendications jugées par certains spécialistes comme saugrenues. J’aime ajouter qu’une certaine partie de la société revendique une démocratie imminente ; je dirai à ces gens-là si vous entamez la construction de votre maison, vous allez vous atteler à ériger des piliers solides pour que votre bâtisse ne s’affaisse pas, alors la démocratie instaurée sans assises solides ne vivra pas longtemps ; il faut du temps, beaucoup de temps, pour avoir une constitution consensuelle, forte et pérenne.
Parlons aussi du Hirak dans le monde arabe, c’est le chaos total soit en Libye, en Syrie, au Yémen et ailleurs. Ces pays frères, voulant le changement de leur régime respectif, sont passés des revendications pacifiques à la violence armée ; des milices ont vu le jour mettant en péril leurs concitoyens et leurs biens. Les habitants ont été chassés de leurs maisons et ont trouvé le chemin de l’exil pour les plus chanceux, pour d’autres ils ont trouvé la mort sous les bombes. Je ne souhaite pas m’étaler sur ce sujet encore davantage, car le terrain politique est toujours glissant. Je souhaite que les régimes arabes respectent la voix de leurs peuples respectifs. Un Etat n’est fort que par ses hommes.

L’écriture, c’est quoi ?

DILMI Athmane : - Je vous réponds par la citation de Marguerite Duras :
- « Ecrire, c’est aussi ne pas parler. C’est se taire. C’est hurler sans bruit ».
L’écriture me permet d’extérioriser les peines cumulées depuis ma tendre enfance et de dénoncer certains comportements néfastes à la société :
-  Violences envers les femmes
-  Violences envers les mineurs
-  Le racisme
-  Le divorce et ses conséquences
-  Le rejet de l’autre

Votre dernier mot…

DILMI Athmane : -Je souhaite voir, un jour, mes modestes ouvrages édités et distribués en Algérie et pourquoi pas au Maroc et en Tunisie.
Je vous remercie de m’avoir permis de me présenter à vos lecteurs. Je demande aux jeunes de s’investir dans les merveilleuses voies de la lecture et de l’écriture.

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