Amale El Atrassi, une Louve Musulmane déchaînée.
lundi 27 janvier 2014 par Abdelali Najah

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Amale El Atrassi a publié son premier ouvrage autobiographique « Louve Musulmane », en collaboration avec Clarisse Mérigeot, aux Editions de l’Archipel en 2013, collection Témoignage et document (200 pages environ).

Dans son premier roman « Louve Musulmane », Amale El Atrassi dénonce les maux d’une société traditionnelle dont elle a été victime à savoir une enfance marquée par la violence et drames familiaux, les sévices que ses sœurs et elle-même ont subi, et le viol collectif dont elle a été victime pour ne citer que ça. « Louve Musulmane » évoque aussi la manière dont les « filles » naissent défavorisées dans certains foyers, bouches supplémentaires à nourrir, alors que les enfants mâles sont investis de toutes les capacités d’attention et d’amour. « J’ai été victime d’un viol collectif, à Rabat, l’année de mes quinze ans. J’y dénonce également, donc, l’absurdité de cette loi marocaine qui veut que la victime soit mariée à son violeur sous peine de causer le déshonneur de sa famille » ajoute-t-elle.

Après le roman maghrébin d’expression française des fondateurs, il vient le rôle de la littérature féminine d’expression française au Maghreb de dénoncer avec violence, ou plutôt avec contre violence, cette société en mutation. « Ne pensez-vous pas que la tradition patriarcale pèse encore sur cette société en mutation ? La religion, de quelque tendance qu’elle soit, semble vouloir remettre la main sur la femme qui s’est libérée, par le biais d’une nouvelle emprise, visible dans le monde entier, comme s’il fallait brider, voiler, cacher, enchaîner cette femme de plus en plus libre » nous déclare-t-elle.
Grosso modo, Amale El Atrassi pense que la famille, les traditions et la culture jouent contre la liberté de la femme se retrouvant ainsi au milieu du plus douloureux des déchirements : comment être soi-même en étant libre, quand on est fille, femme, mère, épouse ? Et pourquoi ces notions sont-elles aussi contradictoires ? Ces catégories nous classent en même temps qu’elles nous enferment dans des systèmes dont il est plus difficile de s’échapper quand on est femme. Quand on est retenue par des dogmes qui n’accordent pas les mêmes droits aux femmes qu’aux hommes, on peut connaître la révolte, face à l’injustice d’une situation, et le questionnement. Le chemin est long pour trouver l’équilibre entre la vie « morale vers laquelle tout nous pousse (la société, la religion, la norme, les injonctions des pédiatres qui moralisent la vie de la mère) et la liberté, qui est au fondement même d’une autre morale, qui définit l’essence de l’être humain.

Depuis la sortie de son livre, Amale El Atrassi subit de violentes pressions de la part de son frère. « Oui, mon frère apparaît dans l’ouvrage, mais très peu. Il fait partie de mon parcours de vie, qu’y puis-je ? La manière dont j’en parle est pleine de tendresse. Elle ne lui porte pas préjudice. J’aurais pu en dire beaucoup plus » nous explique-t-elle.

En parlant de l’Islam dans son livre, l’écrivaine Amale El Atrassi met l’accent sur la différence qui existe entre cette religion et un islam populaire. Elle se sent investie d’une mission de vulgarisation et de mise en garde contre ce qu’elle appelle « l’islam des illettrés », dans lequel les femmes sont considérées comme des « inutilités ». Son livre n’est pas un livre de « dénonciation people » ; donc, c’est le parcours d’une femme meurtrie qui utilise l’écriture comme vecteur d’un message fort. Il soulève des problématiques sociales et théologiques profondes.

Amale El Atrassi est née le 10 juin 1975 à Bourges (Cher). Originaire du Maroc, son père a immigré en France avec sa mère dans les années 1960, pour travailler à l’usine d’électroménager de Rosières. Après avoir eu des parcours personnel et familial chaotiques qui l’ont fait passer par les cases délinquance et prison, Amale compte sur Louve Musulmane pour panser ses plaies et repartir dans la vie sereinement. Louve Musulmane est son premier témoignage rédigé. À travers le récit des moments les plus difficiles de sa vie, elle démonte les absurdités d’une culture dont elle cherche à s’affranchir. Amale est maman de quatre enfants. Elle est, par ailleurs, de dix ans la sœur aînée du comique et animateur de télévision qui porte le même nom.


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