Comme les amours - Javier Marías
samedi 27 février 2016 par Jean-François Ponge

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Gallimard, collection Du monde entier, 2013, 372 pp., traduction d’Anne-Marie Geninet

Roman ou essai ? Les amateurs de narrations inventives, truffées de dialogues et de scènes inattendues, seront déçus. Autour d’une histoire d’amour et de mort, qui aurait pu faire l’objet d’une courte nouvelle, Javier Marías construit une réflexion approfondie sur le sens que la mort revêt, tant pour celui qui en est victime que pour celui qui l’a donnée, et pour les proches qui ressentent la perte de l’être aimé. L’histoire n’est pas banale, elle pourrait être tirée d’un fait divers rapporté par la presse quotidienne, mais l’intérêt du livre réside dans le cheminement intérieur de la narratrice, qui va s’attacher à comprendre le comment et le pourquoi de ce crime considéré a priori comme l’œuvre d’un déséquilibré. Comme dans ces romans psychologiques de l’école française du Nouveau Roman (Robbe-Grillet, Butor, Simon, Sarraute…), chaque geste, chaque pensée, même les plus banals, sont décortiqués dans une vision cubiste du réel, faisant basculer la perspective selon laquelle celui-ci est observé. Malgré la linéarité du récit, de multiples facettes d’une même histoire sont explorées, la narratrice s’imaginant à la place des divers protagonistes : la femme, l’ami, l’ami de l’ami, le porteur du couteau, et bien entendu la narratrice elle-même. Pour qui a la patience d’apprécier ce genre littéraire, tout en passant sur les imperfections de la traduction (certains mots sont totalement inusités en français), le plaisir est certain. Mais les redites sont nombreuses (ce qui n’est pas plus mal si l’on s’est endormi en route) et rallongent encore un peu plus le chemin vers le dénouement final, où quelques dialogues bienvenus allègent le récit.


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