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La Troisième Main, poèmes de Michèle Finck

Recueil paru aux Editions Arfuyen

samedi 14 février 2015 par Françoise Urban-Menninger

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Dans son précédent ouvrage "Balbuciendo", Michèle Finck se demandait qui était ce revenant qui la hantait et lui ordonnait :"Soit le poème/ scanner de l’obscur/ arraché à l’ouïe". Cette injonction à transmuter la musique en poésie, c’est avec la Troisième Main, "L’invisible, main de la grâce, qui se pose sur les fronts" que l’auteure va y répondre tout en appréhendant ce que le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus nomme "les abysses de l’émotion".

Après une opération de la cataracte qui plonge Michèle Finck dans l’obscurité, c’est l’écoute de la musique qui lui ouvre une nouvelle forme d’écriture où les mots et les notes mêlés dansent aux confins de l’être et du silence.

Cette exploration des limites à l’intérieur de soi par la musique et par le poème nous convie à des noces à la fois mystiques et barbares qui ont partie liée avec une forme d’ Illumination, voire d’ Exaltation ou d’ Extase que l’auteure décrit tel un Entrelacement des voix jusqu’à l’orgasme lorsqu’elle écoute Tristan et Isolde de Wagner.

La musique fait corps avec celui du poète, elle fait corps également avec le poème qui l’incarne dans les mots. Mais ces mots sont de chair, de peau, d’os et de sang, ils nous disent la douleur qui traverse l’auteure et qui jaillit d’une "source" de "larmes millénaires". Et Michèle Finck de se ressourcer à l’écoute de Boris Godounov de Moussorgski et d’insérer, en exergue de son poème, cette citation tirée du Livret d’après Pouchkine où L’Idiot s’exclame : "Coulez, coulez, larmes amères/ Pleure mon âme orthodoxe".

Ce qui fait la beauté et l’extrême pureté des vers de Michèle Finck, c’est qu’ils sont taillés dans le vif de la chair mais aussi dans celle de l’âme.

Il n’y a plus de séparation entre le corps et l’esprit, seul un cri de lumière jaillit de cette nuit qui traverse et que traverse celle qui le porte au bord d’elle-même.

Mais quelle splendeur dans ces vers brefs, percutants, irradiants, tout en chair de lumière qui nous initient au vertige des cimes et dans le même temps à celui du néant ! Quelle puissance quand la musique et le verbe nous entraînent dans un paroxysme où les Sons écartelés à mort nous arrachent à nous-mêmes pour nous inviter dans un entre-deux où" Le désir est planté comme un couteau". (Berg : Lulu-Suite. Lied de Lulu).

Et l’auteure d’aller toujours plus avant dans les tréfonds qui l’enferment au coeur (choeur) d’elle-même dans les mots et la musique, ou dans la musique des mots, là où le "Son à la limite du silence(...) Tient tête au néant".

Nul doute que la lecture de "La Troisième Main" avec sa suite de cent poèmes ne peut laisser le lecteur indemne car notre nuit y est pleinement éclairée avec la torche de musique de Michèle Finck ainsi que par cet assourdissant Silence à réveiller les morts !

Car sous la peau des mots, c’est notre être de chair et d’esprit qui est tout entier convié à "Faire des choses avec l’angoisse", selon la formule de Rainer Maria Rilke citée par l’auteure en épigraphe de la note finale de son recueil.
Avec Michèle Finck, nous nous brûlons les ailes dans ce feu intérieur où
Les sons voient... et où nous pouvons "Habiter le silence entre les notes" avant d’enfin parvenir dans "... le havre du poème/ Ouvert sur le large où neige le souffle."

Françoise Urban-Menninger

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