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Les pères et les mères - Aldo Naouri
par Alice Granger

Alice GRANGER GUITARD

Editions Odile Jacob. 2004.

Pourquoi Aldo Naouri a-t-il écrit ce livre, que j'ai lu comme étant le plus personnel de tous ceux qu'il a écrits? Question qui entre en résonance avec une autre question: pourquoi, pendant quarante ans, s'est-il tenu à une place si singulière pour un homme, une place qu'il a défendue envers et contre tout, j'ai envie de dire, par l'alibi de l'exercice de la pédiatrie?

Comme pour dire, envers et contre tout, je suis là? Personne ne s'y attendrait, ou bien personne ne s'y attendrait plus, mais je suis là? Encore là? Toujours là?

J'ai aussi envie d'ajouter, moi, personnellement, que je l'entends dire, dans ce livre: vous pensiez qu'il y avait un cadavre dans le placard, (la retraite comme le cadavre annoncé), mais non, je suis toujours là, vivant, parlant, immunitairement actif!

Ce livre pour résister à quoi, comme de tout son corps et de toute sa parole? Voilà la situation: alors que les progrès techniques, scientifiques et des connaissances ont augmenté de manière saisissante la santé physique des enfants, ils ont des problèmes de plus en plus préoccupants. Tandis que ces enfants sont de plus en plus éternisés dans la satisfaction immédiate de leurs besoins, comme s'ils devaient être protégés du manque à tout prix, à une époque où l'environnement totalement assujetti à la logique de la consommation est en parfaite adéquation avec le rabattement de la vie sur une exclusive logique maternelle, et même plus exactement une logique de grossesse s'étendant à l'infini par le tissage d'un utérus virtuel (étrangement, Aldo Naouri parle de cet utérus virtuel que les mères tissent autour de leur garçon après sa naissance pour le garder en elle, mais ne parle pas de ce qu'il en est de la fille, serait-il, cet utérus, encore d'un autre ordre pour cette fille, et alors proposons que dans son cas il s'agit d'un utérus métastasique, et que c'est là que se situe la fameuse et assez récente mutation), le père, de flou qu'il était, est en train de disparaître!

Ce livre pour dire: non, je ne suis pas d'accord, le père n'a pas disparu, le père flou est toujours là, même si la mère ne le signifie quasiment plus à ses enfants! Comme si le seul problème était le silence de ces mères à propos de lui…Pourtant, flou, Aldo Naouri tient qu'il le reste, tellement il est important que ce soit la mère qui signifie son existence à ses enfants, comme si l'autorité qui émane de lui comme l'inscription de la loi d'interdiction de l'inceste devait en passer par la mère, comme si c'était cette mère qu'il lui fallait convaincre, par des arguments seuls capables de la faire renoncer elle-même aux énormes bénéfices secondaires qu'elles retirent depuis toujours de cette logique de grossesse pèrepétuée.

Les garçons sont beaucoup plus malades que les filles: 75 garçons pour 25 filles! Alors, tandis que les filles, initiées très précocement par leurs mères à ces bénéfices secondaires de la logique de grossesse, restaient donc protégées dans la matrice métastasée formée par ces bénéfices, les garçons ne seraient-ils pas mis en grand danger d'avoir une telle mère follement préoccupée de tisser autour d'eux, avec la totale complicité de la société environnante toute organisée autour du mot d'ordre de la satisfaction immédiate des besoins comme c'était dans la matrice, un utérus virtuel? On entend, dans ce livre, le danger fou que court ce garçon! On l'entend espérer trouver un beau jour le père dans la parole de la mère l'empêchant pour toujours d'être toute à lui, le garçon, disponible, une parole de la mère lui signifiant enfin: je ne suis pas disponible! Je ne le suis pas parce que c'est à ce père que je suis disponible! Et qui est donc ce père flou, ce père qui n'a pas besoin d'être autoritaire pour défendre violemment l'accès à une mère follement disponible puisque celle-ci ne l'est plus? Ce dont il est aussi question dans ce livre, c'est de cette fameuse disponibilité de toujours des femmes, cette ouverture folle et irrésistible ramenant dans le ventre, dans la matrice, et l'instinct sexuel des hommes, non maîtrisable, étant raconté comme la parfaite complicité biologique avec cette ouverture, comme si cette pulsion sexuelle était un pilotage automatique pour ramener au bercail qui n'a jamais été refermé…Mais voilà: il y aurait un garçon qui se serait mis à espérer que le père flou, enfin, enfin, ferme cette ouverture-là…Mais comment ce père flou pourrait-il enfin se tenir là, et, dans la parole de la mère signifier une inimaginable satisfaction qui n'aurait plus besoin de follement chercher son reste dans la descendance? Ce garçon semble espérer la preuve par le père flou que dans cette ouverture-là enfin ça n'a plus besoin de lui…Voilà la question…

Le processus dure depuis des siècles et des siècles et même plus, mais une mutation s'est produite assez récemment, qui semble avoir donné l'exclusivité à la logique maternelle. A la logique hystérique? Comme si l'environnement tout entier, version occidentale, était un utérus? Mais pourtant, quand on est né, ne l'a-t-on pas perdu définitivement, cet environnement utérin? Pour retrouver un autre environnement, bien sûr! Mais il y a bien une perte matérielle, pour commencer…Pourquoi cette perte matérielle ne s'est-elle jamais écrite? Pourquoi, au contraire, son hystérisation?

Alors? Conclut Aldo Naouri. Alors? Y aurait-il une arme contre la mutation qui hisse l'enfant au sommet de la pyramide des valeurs sociétales et qui est devenu le tyran domestique dont tout le monde semble fier de démontrer preuves à l'appui à quel point il est performant? Plus qu'un utérus virtuel, la mutation a fait apparaître un utérus métastasé, c'est ce que je voudrais avancer en lisant Aldo Naouri…Utérus métastasé, dans lequel les filles restent, tellement les bénéfices secondaires valent apparemment le coup…Et pourquoi? Faudrait peut-être aussi se demander, en plus des filles et leurs mères, qu'en est-il des filles et leurs pères…Je dirais que, dans les conditions environnementales au sens large qui sont les nôtres, ces filles sont de sacrées pubs pour le pousse-à-jouir des pères les précipitant dans la disponibilité de toujours…

 

D'abord, Aldo Naouri évoque le désir qui préside à l'acte de procréation. Désir de passer le relais à la génération suivante. Pour que celle-ci écrive un autre chapitre de l'histoire qui lui est inévitablement échue. Sans qu'aucune génération ne réussisse une version parfaite, refermée sur elle-même comme…comme un utérus protecteur? Reconnaître l'imperfection, l'impèrefection, et jeter le relais à la génération suivante et lui demander non sans ironie, alors toi?, réussiras-tu à la rendre plus parfaite, ou bien seras-tu forcée d'admettre, comme nous, cette fameuse imperfection? L'alibi, naturellement, c'est pour les parents de se prouver qu'ils seront plus parfaits pour leurs enfants que ne l'ont été leurs propres parents avec eux, c'est de se consoler en réparant. Mais réparer quoi? Un utérus forcément éventré par la naissance? Se dire un beau jour, bon, mes parents finalement n'ont pas su le réparer pour moi, mais moi, chiche que je ferai mieux qu'eux avec mon enfant, et puis finalement, finalement…quel est-il, ce relais qui se transmet? Un fantasme de matrice parfaitement réparée, ou bien la certitude que l'endommagement n'est jamais réparable après la naissance et qu'il n'est jamais possible de revenir dans le même environnement matériel?

Or, désormais, chacun est invité à ne rien sacrifier de ses besoins immédiats, comme si cet environnement matériel était revenu comme s'il n'avait jamais disparu! Autour, c'est là! Dans la société occidentale!

A propos de cet environnement: les nouveau-nés sont extrêmement sensibles aux variations de cet environnement. A ce stade précoce, l'environnement, c'est la mère. Au stress de la mère, même déjà pendant la grossesse, l'enfant réagira par exemple par des reflux, maladie nouvelle et de plus en plus fréquente constatée dans leur pratique par les pédiatres. L'enfant tout petit sent ce stress maternel parce qu'il s'écrit littéralement dans les muscles de la mère. Et pourquoi ce stress grandissant, alors? Parce qu'elle veut être à elle seule tout l'environnement de son enfant, comme s'il était encore en elle, tissant donc l'utérus virtuel ou métastasique autour de son enfant, ce pouvoir totalitaire lui conférant un bénéfice narcissique époustouflant, mais la pression mise sur elle par un environnement sociétal qui marche à fond dans sa logique de grossesse à éterniser est telle qu'elle se trouve en permanence en danger d'être prise en flagrant délit de n'être pas assez parfaite! Et peut-être aussi cet enfant ainsi remis dans le ventre réagit-il par un reflux à une toute puissance maternelle qui dit non à sa propre capacité de se mettre déjà aux commandes de sa vie?

Depuis la nuit des temps, nous sommes soumis à des contraintes adaptatives! Alors, question: dans le cas où un environnement si riche, si là, si capable de perfuser au doigt et à l'œil de quoi toujours satisfaire les besoins immédiatement, ferait croire à la réalité indéniable d'un retour intra-matriciel, faut-il encore s'adapter à cet environnement-là? Ce serait une curieuse adaptation, que celle de s'adapter, une fois né, à un environnement se présentant de manière totalitaire comme étant, magiquement mais aussi matériellement, celui qu'on croyait avoir perdu? A croire que quelqu'un pense en être propriétaire, de cet environnement! De cet utérus matriciel!

La grande question, peut-être: l'environnement, est-ce que quelqu'un le possède? Ou bien encore, est-t- il du même ordre que l'environnement matriciel? Les femmes le possèdent-elles?

Les figures parentales, écrit Aldo Naouri, n'ont cessé de lutter l'une contre l'autre, depuis le commencement, sans que rien jusqu'à aujourd'hui n'ait vraiment changé! On a l'impression que chacune de ces figures a toujours cherché à tirer la couverture, pour ne pas dire justement l'environnement, tout ce quelque chose de matériel entourant les humains, à soi, et comme si, par l'effet d'une mutation récente, les femmes avaient enfin réussi à la tirer toute à elles, parce qu'en fin de compte leur logique à elle serait plus intelligente et plus efficace vue à court terme! Comme si ces femmes, viscéralement et animalement attachées aux bénéfices secondaires qu'elles retirent depuis toujours de la logique de grossesse, non seulement un statut de toute puissance mais aussi une installation à vie dans le système, avaient réussi à persuader les hommes qu'eux aussi pouvaient, s'ils étaient obéissants, partager avec elles ces mêmes bénéfices secondaires. Ceci étant possible par l'amélioration matérielle stupéfiante de notre environnement apportant de l'eau au moulin des femmes! Mais à propos, n'y aurait-il donc aucune chance d'obtenir la réalisation de bénéfices primaires par une vie de couple? Les bénéfices secondaires, c'est comme un gâteau délicieusement sucré en récompense, parce que l'homme a été bien gentil, ou bien un gâteau sexuel, et alors, ce gâteau, d'où le sort-elle, et n'est-il pas, en fin de compte, dangereux pour la santé surtout des garçons? D'où sort-il, ce gâteau, cette disponibilité folle, ce pousse-à-jouir rendant fous les mâles dont la pulsion sexuelle est comme un pilotage automatique programmé sur le retour instinctif au bercail? S'il y avait un père flou au travers de cette ouverture, en sacrée surprise, signifiant qu'enfin la matrice s'est détruite avec la fin de la grossesse, il n'y aurait sûrement pas de gâteau à partager entre la horde des mâles, même si un mâle dominant fonctionnait comme pub pousse-à-jouir mettant en avant la chose follement attirante…

En tout cas, au cours de ces millions d'années, ceux qui n'ont pas su s'adapter, au cours d'innombrables essais-erreurs, ont disparus!

Peu à peu, en s'adaptant, les humains ont modifié leur physique! De manière par exemple à bien pouvoir explorer cet environnement hostile, inconnu, pour accumuler les performances adaptatives transmissibles à la descendance.

La pensée s'est mise en place à partir de la notion de différence, la première de ces différence étant la différence sexuelle. Hommes et femmes: deux sous-espèces de l'espèce humaine!

Voilà: le moteur central et la recherche de l'amélioration des performances de ce moteur, c'est l'instinct sexuel, ceci pour les hommes. Les hommes ne pensent en quelque sorte qu'à ça, depuis la nuit des temps, et les femmes, comme par hasard toujours disponibles, et affolantes de l'être sans aucun impossible, sont l'objet des échanges entre les hommes, les poussant à s'organiser. Et elles, les femmes, sont les enjeux incontestés et incontestables. La disponibilité! L'utérus ouvert! Resté ouvert! La matrice pas encore détruite! Pas encore…morte! La seule chose dont il faudrait pourtant être sûr, non?, n'est-ce pas que cette matrice dont les humains viennent est morte, que c'est ça, surtout, la mort? La mort de cet environnement originaire… La disponibilité affirme totalitairement le contraire! Que ce qui devait disparaître est toujours là, dans la disponibilité stupéfiante, addictivante, courant après pour rattraper, pour remettre dedans… Alors, bien sûr les femmes n'ont pas, comme les hommes, la conscience du temps, puisqu'elles, se croyant propriétaires d'une matrice immortalisée par la mutation, d'une matrice qui n'est pas morte en fin de grossesse, d'une matrice rendant enfin possible de pèrepétuer cette grossesse dans une version délirante de la vie en société, restent dans le non-temps utérin.

Les hommes n'y peuvent rien, c'est l'instinct sexuel à satisfaire plus ou moins immédiatement qui les mène, et la seule chose qu'ils peuvent faire, c'est non pas agir sur la satisfaction, à obtenir coûte que coûte, mais c'est organiser la possession de telles et telles femmes plutôt que d'autres, à cause de l'agressivité entre hommes sur le terrain d'un partage des femmes que celles-ci acceptent passivement. D'un côté des hommes pourvus d'un moteur qui les pousse à, disons, rentrer dedans, qui hallucine ce dedans à partir de la beauté des seins qui en font la pub, et de l'autre, des femmes qui laissent ouverte la porte pour que les hommes jouissent des sucreries qu'elles leurs réservent dedans, et ceux-ci seront sans même le savoir pendant longtemps des géniteurs occupant les femmes à une logique de grossesse qui, parce que cela se passe comme tout seul à l'intérieur d'elles-mêmes, est comme un pilotage automatique dont elles ne cessent de faire croire qu'elles sont la pilote toute-puissante. La grossesse, ça se fait tout seul, mais tout se passe comme si c'était elles qui faisaient tout. Après la naissance, ce n'est plus automatique, donc ce n'est plus du tout pareil, mais ne veulent-elles pas toutes que cela revienne comme automatique, et notre environnement matérialiste et publicitaire ne cherche-t-il pas justement à l'installer, ce pilotage automatique sur lequel les mères se brancheraient pour faire croire que rien n'a changé, c'est encore comme dedans? Ceci dans la dénégation totale de la disparition de l'environnement utérin, et de la réalité de cette écriture sensorielle qui reste dans le cerveau et dans le corps de l'enfant qui naît et qui est la référence unique pour qu'il se mette lui-même aux commandes de sa vie. Une mère qui sait, aujourd'hui plus que jamais, satisfaire les besoins immédiats de son enfant, ne dénie-t-elle pas à cet enfant cette capacité qu'il a de se mettre lui-même aux commandes de sa vie sur la base de l'expérience écrite déjà dans son cerveau et son corps, de son séjour dans la matrice où il aura été?

Dans le sillage de Freud, Aldo Naouri pensait que la Loi de l'espèce était la Loi de l'interdit de l'inceste, impliquant des choix matrimoniaux exogamiques. Mais, observant pendant quarante ans la dyade mère enfant, et aussi, j'imagine, des choses plus personnelles, il en est venu à faire une trouvaille remarquable. Il n'y a aucune date de mise en place de cet interdit de l'inceste, par contre, il y a une date des premières sépultures. Des hommes, pour la première fois, ont été enterrés, à une époque où ils étaient volontiers cannibales, se tuaient entre eux sans états d'âme, et étaient nécrophages. Pourquoi ne pas dire que, puisqu'il n'y a pas de date, c'est que, même à ce jour, il n'y a pas vraiment d'interdit de l'inceste, parce qu'il n'y a pas ce père flou barrant cette disponibilité? Et que cette Loi d'interdit de l'inceste scellée entre les mâles bien après la première sépulture n'est qu'une loi déplaçant d'une manière exogamique l'inceste, selon la définition de l'inceste comme fabriquer du même avec le même, et état de non-manque, inceste comme retour intra-utérin, comme retour à un statut de non manque?

Aldo Naouri découvre l'existence de ce cadavre pas comme les autres, et se demande pourquoi il a été enterré, pourquoi on a roulé sur lui des pierres, des rochers, des branchages. Très vite, il écrit qu'il s'agit d'un meurtre, et même d'un meurtre collectif, commis par une horde de mâles à l'endroit d'un mâle dominant, donc craint, qui jouissait tout seul de toutes les femmes, lesquelles évidemment se laissaient faire. Ensuite, après leur forfait, cette horde d'hommes a eu peur que ce cadavre revienne se venger, tellement de son vivant il était puissant. Etait née l'angoisse de mort, et en même temps un embryon d'organisation qui s'inaugura par cette sépulture, des rochers roulés dessus le cadavre, dans l'anticipation d'un risque de mort qui pourrait survenir plus tard si jamais il redevenait vivant. Selon Aldo Naouri, l'angoisse de mort serait apparue lors de cette sépulture première! Ce mâle dominant n'était-il pas, donc, la pub pousse-à-jouir de la disponibilité totale de la mère à travers toutes les femmes si passivement disponibles? Le contraire du père flou…La pub très ancienne d'un pousse-à-jouir incestueux?

Question: l'angoisse de mort, qui atteint bien plus profondément les garçons que les filles, est-elle liée au risque que la faculté d'anticipation leur fait voir que le cadavre menace de revenir tuer et donc leur font admettre le caractère précaire de leur vie, ou bien naît-elle de ce que plus aucun mâle dominant n'est là pour rendre impossible de jouir de toutes les femmes, donc de la mère? Parce que, au fond, l'accès à la mère, laquelle est comme toutes les femmes si ouverte, si disponible, n'est-ce pas, était rendu impossible par le mâle dominant prototype d'un père autoritaire mais en même temps signifiant la mère possible, et son cadavre atteste de la possibilité même de cet inceste! Et même toutes les femmes étaient follement possibles mais impossibles que grâce à lui, ouvertes au seul homme dominant, et pas aux autres…Le cadavre, découvert par Aldo Naouri, et la sépulture qu'avec les frères de la horde il s'agit d'inventer vite, vite, et l'angoisse de mort qui surgit, tout cela pourrait suggérer qu'envers et contre tout l'interdit de l'inceste aurait bel et bien existé mais comme attestation qu'au commencement était l'inceste, mais l'interdit aurait été un homme barrant l'ouverture et non pas une parole signifiée par la mère, et le seul fait d'avoir dû, sous l'emprise du fameux instinct sexuel, le tuer étant une preuve de sa réalité. Preuve, en fait, d'un pousse-à-jouir incestueux mais à déplacer, à organiser pour mieux l'accomplir. Angoisse de mort d'être ramené dedans, d'être dénié capable de se mettre aux commandes de sa propre vie, mais angoisse traitée par la solution du déplacement exogamique de l'accomplissement de cet acte incestueux?

Il y avait donc, un beau jour, en croyant pouvoir entrer comme ça, au gré de la pulsion sexuelle non maîtrisable, puisque la disponibilité des femmes semblait totale, la découverte qu'en travers de l'ouverture il y avait ce mâle dominant, et, pour pouvoir entrer, pour pouvoir se trouver effectivement une ouverture comme une chacune pour chacun des mâles, il fallut le tuer. Il y avait cet instinct sexuel ne permettant pas de ne pas penser qu'à ça, il y avait des femmes toujours disponibles, et, heureusement, il y avait un mâle dominant, qui était quelque chose comme une pierre dure capable de mesurer cet instinct sexuel, capable de lui donner corps, capable de l'initier. Le tuer: représentation de copulation? Cadavre: preuve d'avoir joui par cette petite mort? Meurtre comme représentation de l'activité sexuelle? Sépulture comme représentation d'être revenu dedans? Conscience du temps, de la déchéance, d'être mortel: représentation de la certitude d'être enseveli, remis dedans, par le pouvoir de la mère sûre remballant par la disponibilité bizarrement passive des femmes?

Et si ce qui clochait depuis si longtemps c'était ce fantasme féminin de pouvoir enrayer la décomposition de la matrice signifiant la fin de la grossesse? Et alors, mon gâteau est obligatoire! Non, tu n'as pas de capacités propres, intégrées dans ton cerveau et sensorielle ment dans ton corps, pour être aux commandes de ta vie!

Et si les femmes laissaient cette matrice dans laquelle chacun, du temps révolu de la grossesse, aura été, se décomposer? Et si, donc, cette mort-là de l'environnement originaire n'était plus déniée?

Allez donc lire ce formidable livre d'Aldo Naouri, car le plus personnel!

Alors?

Alice Granger Guitard

28 avril 2004

 

 

 

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