vendredi 10 février 2006 par Catherine Nohales
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Dans le dernier roman de Jean-Paul Comtesse, Les Racines à Fleurs, les mythes et légendes se fécondent, engendrant un univers qui dilate nos repères spatio-temporels. Ainsi, au sens littéral du terme, sa lecture est vertigineuse odyssée.
La Bible, la lointaine Antiquité païenne sont le terreau du dernier ouvrage du romancier. Une constante, cependant, dans l’oeuvre de l’écrivain : un homme au coeur de femmes conteuses, libres et indépendantes, farouchement indépendantes.
Annie :" Mon ami, tu as été désigné comme Matthias le fut, maintenant nous pouvons nous séparer car le temps fait un virage."
Pauline : " Bien en vue contre la cafetière du petit déjeuner, un billet :" Ne m’attendez pas, je ne dirai ni adieu ni au revoir à Angelo ; reprenez votre route et soyez heureux."
Entre elles, Jérôme funambule...
Entre elles, la Parole fondatrice, celle du Commencement de toute histoire, un homme, une femme, l’humanité tout entière. La Genèse du roman :" Jérôme était assis au bord de la mer et se souvenait d’Annie, Annie qui disait si souvent :" devant la nature, je deviens."
Voici la phrase inaugurale de la naissance d’Annie, sa renaissance devant la nature, matrice des hommes, matrice du roman.
Dans Les Racines à Fleurs, les femmes sont des conteuses, telles des Shéhérazade qui perpétuent l’humanité vivante. Elles créent un "imaginaire réel". La Parole, au sens biblique du terme, est centrale dans le roman mais elle est détenue par les femmes, ces déesses auxquelles rend hommage Jean-Paul Comtesse. Elles nomment comme dans la Genèse :" Mon premier acte de foi sera de choisir un prénom." [...] "Annie,lorsqu’elle caresse les feuillages entremêlés en arabesques, dit : arbesques. Arbesque et arbritude sont deux mots de son vocabulaire." Elle est aussi l’instrument de Lucas, romancier confident de Jérôme, double, on le devine, de l’écrivain suisse.
Les néologismes sont Création, à l’instar de Dieu le Fondateur. Le Christ est d’ailleurs désigné dans le roman, dans l’Evangile selon Lucas, comme le Fondateur.
Les Racines à Fleurs sont un roman panthéïste. Dionys, la fille de Pauline, la chatte aux yeux safran, est tout droit issue des bosquets de l’Olympe, de l’Antiquité païenne et si vivante. Elle est la fille d’Angelo, un amant de passage, immortalisé par Giono.
Ainsi, l’oeuvre de Jean-Paul Comtesse sonde toujours plus loin la Création littéraire. Il ne s’agit pas seulement de narrer simplement la liberté mythique des femmes mais de réfléchir sur le sens de la Création, sur la Genèse d’un roman, d’une oeuvre littéraire. Dans Les Racines à Fleurs, l’écrivain est un démiurge et joue avec le lecteur. Pouvoir suprême sur le co-créateur. Les références abondent et construisent donc plusieurs univers poétique, biblique, mythologique sans qu’ils n’entrent jamais en contradiction les uns avec les autres.
La langue poétique du romancier est le bréviaire indispensable d’une telle odyssée. Le romancier invite à la vigilance. Il joue avec la temporalité, passant brusquement d’un passé à un présent péremptoire qui assène le carpe diem. Peut-on être si catégorique ? Je le crois. Il faut vivre, disent nos déesses romanesques. Il faut impérativement vivre. D’autant plus qu’on nous abreuve jusqu’à la nausée, jusqu’à la dépression, de cataclysmes, d’obscurité sociale, humaine. Il fait très froid dans notre monde.
Les Racines à Fleurs sont un hymne à la vie, à la littérature.
Indispensable.
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Messages
1. Les Racines à Fleurs, Jean-Paul Comtesse, éditions Monographic, 5 octobre 2011, 13:24
Je désire laisser un message car l’auteur (Catherine Nohales, pas Jean-Paul Comtesse) a très bien saisi le message que Racines à Fleurs souhaitait transmettre. Bravo et merci ! Joyce Roth.