de Jean-Paul Comtesse, aux éditions de l’Aire
mardi 14 décembre 2004 par Catherine NohalesPour imprimer
Il était une fois des femmes libres à la séduction fougueuse immémoriale.
Elles sont ainsi, les femmes de Jean-Paul Comtesse : libres, toujours libres, éternellement fugueuses et sensuelles. Monique, Elsa, Marie-Jeanne, Solange se déploient, vibrionnent autour des hommes et du narrateur en particulier.
Ce dernier est le témoin passionné, et cependant discret, des amours douloureuses, tragiques (ce sont les plus belles) de Monique et de Jacques, puis du docteur Tarpan et de Marie-Jeanne après une tentative fastidieuse, peu convaincante avec la triste Elsa. Celle-ci est une des figures les plus émouvantes du roman. Elle est pathétique dans ses étreintes grotesques et banales. Obligée de lever la cuisse pour en être, pour s’imaginer avoir des amis. Le prix à payer est terrible : celui d’un désenchantement qui gagne la pauvre Elsa, femme flouée, bafouée. Jean-Paul Comtesse raconte, parce que nous sommes dans la fable, les liens sordides qui peuvent lier les êtres.
Monique, elle, décide, entreprend mais sous les éclats de rire, se trouvent la faille, la blessure qu’elle dissimule en fuyant. La Fugueuse n’est pas une mais multiple, possède divers visages qui annoncent Sabika Desirade, la femme au livre.
Les hommes, dans ce premier roman du conteur suisse, sont fragiles : ils sont poètes, tels Lucas Tarpan. Les êtres, dans ce roman, sont fragiles, parce qu’ils se fuient, parce qu’ils se cherchent, s’approchent et se brûlent.
Ce que j’ai aimé dans cette relecture, c’est la justesse de l’analyse psychologique. On s’y retrouve. Et puis les blancs, les silences que vous comblez vous-même. Tout lecteur est acteur du voyage qu’il entreprend au commencement d’un livre.
La Fugueuse est un roman sur la fable, l’Histoire. Nos héroïnes sont de la nuit des temps, ce que dit l’incipit lorsque sont évoquées les origines d’Helvétie. La Fugueuse est un roman où la poésie façonne l’éternel féminin.
Dans les ouvrages de Jean-Paul Comtesse, l’amour est amour des mots, de l’image qui relie le ciel et la terre, la femme à sa lointaine aïeule.
C’est ce que j’apprécie de longue date. Et puis son optimisme incurable qui n’a rien avoir avec de la guimauve. Il en va de même dans Jeudi, je t’aimerai. On pleure, on rit. C’est la vie. L’amour triomphe, sans tambour ni trompette, certes, mais il triomphe et je crois essentiel d’en témoigner, de le dire, de le clamer.
C’est le rôle de la littérature.
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