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La troisième pierre - O. de Paillerets
samedi 23 février 2008 par penvins

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Editions du Bon Albert - ISBN 2-910834-23-9

Prix Arverne 2008

Le titre de ce roman est bien sûr un indice de ce qui se dit dans cette histoire familiale. Au-dessus du Racagé il y a trois dolmens, un seul cependant est couvert de sa dalle, la seconde sert de table et la troisième… est dressée au milieu du pont comme pour abriter du vent du nord, cette pierre dira le comte de Payre aurait pu servir de recluse. Et d’expliquer qu’au Moyen-Âge dans certaines villes on enfermait une femme dans une loge au milieu du pont principal de la ville, victime sacrificielle elle assurait la protection contre les disettes et les brigands, elle y restait jusqu’à sa mort.

Ce roman historique se situe au tout début du XIXème siècle, la Grande Histoire va être marquée par la retraite de Russie, les campagnes sont parcourues par les recruteurs mais il est une autre histoire qui se déroule parallèlement, celle des femmes et du poids considérable que fait peser sur elles la société pour assurer sa survie. Rien n’est encore définitif de l’abolition de l’Ancien Régime et cependant les familles nobles se trouvent dans une situation économique difficile, pour reconstituer leur domaine les Payre doivent trouver de l’argent. Un coup de dés décidera de qui épousera la riche héritière.

En même temps que ce roman raconte la vie des femmes et le difficile passage vers un temps de plus grande liberté, il raconte les relations compliquées entre l’individu et la société, il évoque un temps pas si lointain où la nécessité sociale prévalait sur le plaisir individuel. Tout le roman – et jusque dans la construction de la famille de Payre – est dans ce double jeu, la réalité de la vie qui fait de Louis Bardalou, non seulement le frère de lait de Géraud mais également son demi-frère naturel et la réalité sociale qui – sans méconnaître cette vérité - impose sa propre vision pour que se perpétue ce qui doit se perpétuer.

Louis est l’archétype de l’homme de devoir tandis que Géraud sera celui de l’homme de plaisir. Ce sont les femmes qui feront le choix, Marie revient vers Louis, Gabrielle quitte Géraud, mais les deux choix ne sont pas du même ordre, celui de Marie reconstitue la famille après avoir tenté l’aventure de la chair, elle revient vers celui qui construit, qui après avoir sauvé le château a inventé son propre destin, un destin d’entrepreneur, celui de Gabrielle tout au contraire apparaît comme une fuite.

Pourtant il y a quelque chose qui les caractérise l’une comme l’autre, par-delà la nécessité sociale Marie a refusé que le sort lui interdise le plaisir de la chair comme celui de la maternité, Gabrielle refuse également que l’on ne tienne aucun compte de ce qu’elle est, que personne ne l’estime pour elle-même. L’une comme l’autre ne sera pas la troisième pierre, la victime que l’on sacrifie sur un coup de dés.

On pourrait dire de ce roman dense, qu’il est un roman de la construction, parce que la pierre, – la troisième pierre, celle qui vient en tiers - a bien cette fonction non seulement de consolider le pont qui traverse les générations mais de construire un monde nouveau, différent de l’ancien - celui de l’Ancien Régime - où elle prendra la place de la recluse pour que les femmes ne soient plus sacrifiées au plaisir ou aux intérêts des hommes, mais au contraire permettent que renaisse le passage, que le pont entre les hommes se perpétue pour un nouvel avenir. Comme la première pierre d’un nouvel ouvrage qui réconcilie avec un passé prêt à disparaître malgré les soubresauts de la Restauration. Odile de Paillerets nous invite à revisiter notre passé et si elle montre bien les sacrifices demandés aux femmes c’est aussi en nous faisant sentir leur utilité.

Roman assurément complexe à l’image même de la vie, cette troisième pierre pour laquelle l’auteur a choisi une écriture très classique mérite une lecture attentive, on y fera un détour par un monde qui peut paraître lointain et qui pourtant a tout juste deux siècles, où les individus savaient tout en les détournant accepter les contraintes de la vie en société. On ne regrettera pas d’avoir un temps laissé de côté les ouvrages publiés par les éditeurs parisiens pour ce courageux petit éditeur installé lui aussi en Aubrac.



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