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La Ritournelle - Perrine Le Querrec
dimanche 1er avril 2018 par penvins

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On est hors des certitudes, alors bien sûr c’est difficile à lire, cela demande à être lu et relu, cela ne laisse que peu de place à la syntaxe ordinaire, bouscule la perception chronologique que nous avons apprise depuis toujours. Il nous faut sans cesse réinterroger ce que nous croyons avoir compris de ce couple d’enfants Eugène et Georgia, de leur mère qui les aura détesté parce qu’être enceinte accoucher signifie mourir et que le lecteur est embarqué dans une autre langue déstructurée, un autre monde sans ses habituels repères où l’on ne sait jamais du premier coup, où l’on ne sait même pas toujours à quoi se rapporte l’adjectif, où se trouve le verbe, quel en est le sujet, où l’on se demande parfois si la marque du pluriel a été volontairement ou non oubliée. La phrase certaine, celle d’un monde de certitude ici n’existe pas, ne saurait exister tant la perte du « bon sens » est consommée. On ira voir ailleurs, dans d’autres textes, mais aussi des fragments de biographie, tenter de percevoir quel est le sens de cette écriture qui littéralement désoriente, dit à quel point nous avons du mal à comprendre ce qui sort du champ de nos habitudes. On entendra surtout la langue produite par ce pas de côté, sa force de recomposition, ce qu’elle dit de la fragilité de nos repères, de l’enfermement que produit notre syntaxe. Ici l’accumulation étouffe, construit la caverne vers laquelle revenir, parvenir au cœur de l’organisme […] où leurs restes seront conservés.

La Ritournelle a osé aller voir du côté de Suzanne, dire le refus d’être mère et la culpabilité liée à ce refus, elle explore l’univers de ces deux enfants l’un enfermé dans la collection des objets souvenirs de la morte, l’autre se livrant aux hommes à l’image de la putain du père (Roma) mais consciente qu’elle doit – faute de quoi elle serait elle aussi étouffée - se défaire de ses vêtements : Impossible dit-elle une fois l’homme passé de conserver le vêtement si prompt à devenir souvenir. Et ce rejet des souvenirs laisse sans doute entendre, se défaire de la figure du père ablater courts et longs souvenirs est-il écrit à propos du datif et ablatif de Roma.

Il faut lire en parallèle Le plancher, également roman d’une folie familiale. La matière est dense, mais on n’est pas là pour lire des romans vite écrits, vite jetés ! On est là pour que le texte nous interroge et celui-là, ceux-là, méritent qu’on les lise et qu’on les relise.



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