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Le goût de la salade sucrée - Muriel Klein-Zolty

Témoignage publié aux éditions Ampelos

jeudi 20 mars 2025 par Françoise Urban-Menninger

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Sous-titré "Hugo Fonyo, je crie ton nom !", c’est cet appel qui résonne dans ce livre lumineux dans lequel l’autrice va tirer des fils pour retisser la mémoire de son grand-père disparu à Drancy "au seuil de l’innommable". A l’instar, de celui qui fut, entre autres, tapissier de métier, Muriel Klein-Zolty va restaurer les liens, les entretoiser, tarauder le passé pour redonner sa juste place, en le remettant au monde, à son grand-père juif hongrois disparu dans la Shoah.

C’est dans l’appartement strasbourgeois où elle a grandi que Muriel Klein-Zolty, docteur en sociologie et écrivain, fait part à sa mère de son désir d’écrire sur son grand-père. Dans ce même appartement, sa mère lui confiera en deux temps "les encombrants fantômes" qui dormaient dans le haut d’une armoire où ils étaient relégués.
Le premier dossier va amener l’autrice et sa mère, ainsi que le lecteur, sur les traces du passé hongrois de Fonyo Hugo dont on a déjà découvert le portrait prégnant sur la couverture du livre. Les photographies contenues dans ce dossier, celui d’une femme "au regard doux", celui d’une petite fille "aux yeux un peu bridés" interpellent la narratrice qui décide de partir avec sa mère sur leurs traces en Hongrie.
Ce voyage les mènera à Györ où Hugo a grandi, puis à Budapest où des souvenirs en dormance dans la mémoire de la mère de Muriel resurgissent, ce sont les histoires transmises par son père, celles qui ont partie liée avec sa vie d’acteur et de chanteur d’opérettes mais aussi des anecdotes comme celle qui donne le titre à ce livre, à savoir le sucre dont Hugo assaisonnait sa salade et qui revient, telle une madeleine de Proust, sous la langue de la mère de Muriel. Ce sont autant d’émotions à partager avec le lecteur et que celui-ci retrouve en découvrant les archives photographiques qui illustrent cet ouvrage.
Mais cette vie hongroise dont Hugo gardera toujours la nostalgie, il va devoir la quitter, d’abord pour Budapest, puis Vienne et enfin Paris "pour échapper à l’étau qui se referme". A Paris, il reprend le métier de tapissier appris avec son père et c’est alors la partie française du livre qui s’ouvre, quand de retour à Strasbourg, la mère de Muriel lui confie un deuxième dossier. Le récit reprend, les fils se renouent en 1927 quand la grand-mère de Muriel épouse Hugo suite à une annonce parue dans un journal. Suivent les années vécues dans le village de Duppigheim en Alsace, le travail de tapissier dans la Maison Bergmann à Strasbourg, puis la petite entreprise créée par Hugo 27 rue Louis Apfel à Strasbourg.
Muriel Klein-Zolty au cours de son enquête qui s’apparente à une quête initiatique remonte le temps, dénoue les noeuds d’une histoire familiale qui s’inscrit dans la grande Histoire. Une écriture fluide, limpide, éclaire ce texte qui fait revivre les figures enfouies dans son inconscient, "cet obscur" dont Henri Meschonnic dit qu’il "travaille en nous", on repense avec l’autrice à la petite soeur d’Hugo, la mère de ce dernier mais aussi à la mère de Muriel qui ne verra jamais ce livre...
Les affres de l’Histoire ont emporté son grand-père qui aimait la France et qui n’a jamais été naturalisé, lui qui avait eu des responsabilités à la Ligue des Droits de L’Homme ! Arrêté à Joinville où la famille s’était réfugiée, Hugo a passé 22 jours à Drancy avant de disparaître dans la Shoah. Celui qui est toujours resté un "étranger" en France, trouve enfin sa place grâce au livre de sa petite-fille, Muriel Klein-Zolty, qui lui redonne vie et âme. La dernière page tournée, les photographies de cet acteur nous poursuivent depuis l’au-delà, l’image d’une petite chaise en tissu rouge qu’il avait réalisée pour la maman de Muriel, sa mandoline et surtout ses poèmes traduits du hongrois par Madame Salomon égrènent de merveilleuses notes d’espoir composées aux marges de l’infini :

Je pleure sur mes belles idées
Je pleure sur les fleurs fanées
Mais au monde nouveau je crois encore
Frayons la route au temps meilleur
Les roses rouges s’ouvriront à nouveau

Françoise Urban-Menninger



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