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Des fourmis dans la bouche, Khadi Hane

Editions Denoël, 2011

jeudi 18 août 2011 par Alice Granger

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Je ne sais pas s’il s’agit simplement des inextricables difficultés d’une femme africaine à Paris, élevant seule ses quatre enfants et exclue de sa communauté à cause de sa liaison avec un homme blanc qui lui a donné un fils métis, dans ce beau roman de l’écrivaine sénégalaise Kadhi Hane.

J’ai envie d’y lire beaucoup plus. Ne serait-ce pas le roman qui fait passer l’éclosion si difficile de la liberté d’une femme, africaine ou non, par le deuil d’une sorte de calcul exploitant la reproduction humaine et les femmes, l’Afrique venant sur la scène de l’Occident mettre en acte cette question-là jusqu’à ce que cela ne puisse plus tenir, plus durer. Une femme demande à un pays de s’occuper des enfants qu’elle a engendrés. Mais quel pays ?

Dans un premier temps, même si elle a envie de se révolter, une femme africaine (mais on pourrait dire simplement une femme) ne peut qu’accepter que la reproduction humaine, via l’hameçon sexuel qu’elle est pour les hommes, passe par son corps. Une fois que ça marche, alors même qu’elle résiste toujours, et que, comme par hasard elle fuit en France, pays dont on dit en Afrique qu’il est très riche et que c’est facile d’y vivre, la femme africaine ne peut pas faire autrement que fonder un calcul sur ses enfants, qu’elle continue d’engendrer sans jamais attendre que ce soit leurs pères qui les assument, ni l’Afrique. Les enfants vont permettre à cette mère de calculer, inconsciemment bien sûr, une aide de la part de la France. Alors même que cette femme ne nous apparaît jamais vraiment calculatrice. Le calcul passe par elle. Il est aussi bien celui de sa famille africaine, qui compte sur ses envois d’argent. C’est une femme, donc elle attire sexuellement les hommes, même si elle ne veut pas de l’homme beaucoup plus vieux qu’elle auquel sa famille la marie à l’adolescence, et cela aboutit aux enfants, qui vont justifier qu’on aide (la France) cette mère, qui enverra une grande partie de cette aide en Afrique. D’où des enfants… spoliés par la famille restée en Afrique de l’aide que la France leur donne. L’anomalie dans l’histoire, c’est que les allocations sociales destinées aux enfants vont en Afrique, non pas à eux. Et c’est ça qui conduit notre héroïne du roman dans l’impasse. Jusqu’à devoir, on l’imagine à la fin, aller demander des comptes à l’Afrique, et même poser à l’Afrique elle-même la question des enfants. Ses enfants, l’Afrique peut-elle les faire assumer, éduquer par la France ? La mère, qui avait fui vers la France riche, revient au pays, chargée de ses enfants…

L’héroïne de ce roman, une Malienne de trente-deux ans, bien sûr dénonce l’ambiguïté de ces femmes africaines qui se plaignent de leur sort mais en même temps font tout pour pousser leurs filles à avoir le même, et débordent d’imagination sexuelle pour plaire à leurs hommes ?

Beau crépuscule avant la chute, puisque l’homme blanc lui apprend à aimer, à jouir de la vie, bref lui renvoie un tout autre statut de la femme, en fait une image de femme occidentale. Ensuite, il ne mord pas à l’hameçon sexuel de la femme africaine qu’elle est… En tout cas, l’héroïne africaine de ce roman, dès qu’à l’adolescence elle est directement concernée, se dédouble : une part d’elle est forcée d’accepter le mariage avec un vieux polygame, de l’autre elle résiste follement, et ce sera le début de ses vicissitudes. Elle osera être la cible de la honte. Tout en devenant soutien de sa famille restée en Afrique, lorsqu’elle sera en France, le pays où il y a de l’argent…

Ce calcul ancestral des femmes (et à partir d’elles, des hommes africains dans ce contexte post-colonial où le pays colonisateur est raconté comme riche, séduisant) bien sûr se camoufle derrière l’assertion qu’elles n’ont aucune identité personnelle parce qu’elles sont des femelles, bref qu’elles n’y peuvent rien si les mâles décident de leur sort et se les partagent.

Et si la population tout entière d’un pays se conduisait comme une communauté de pas vraiment nés, prenant l’Europe pour leur placenta nutritionnel, lorgnant tout le réseau d’aides, et se plaignant que, par exemple, la France en vérité leur fait une vie misérable, ce qui est vrai, mais la misère vient aussi du fait que leurs familles restées au pays leur ponctionnent une grande partie de leurs revenus ? Ce qui pose bien sûr une question plus ample, voire politique : pourquoi les pays africains, ici le Mali, sont-il pauvres, et comment la richesse consumériste de l’Occident transforme-t-elle l’imaginaire et les fantasmes des Africains au point qu’ils conçoivent par exemple une France qui n’existe pas vraiment et qu’ils oublient que le pays où ils doivent logiquement vivre c’est le leur, dont l’organisation pose problème. Khadi Hane excelle à décrire ces Africains qui vivent misérablement à Paris, mal payés mais ponctionnés par leurs familles en Afrique, et qui continuent pourtant à faire croire à leurs pays d’origine qu’ils vivent comme des rois, paradant lorsqu’ils reviennent au pays. Ce roman met particulièrement en relief un non-dit concernant les conditions de vie des Africains en Occident : ce non-dit continue à nourrir le fantasme des pauvres Africains qu’en France on vit comme des rois… Un non-dit qui, peut-être, en faisant croire à un ailleurs paradisiaque, empêche les Africains de s’investir dans leur propre pays. Il faut faire le deuil de la possibilité de l’émigration pour enfin s’attaquer aux problèmes, immenses et tragiques, d’un pays, et, enfin, construire et projeter, pour que la communauté humaine en devenir puisse espérer y vivre. Le roman de Khadi Hane ouvre une réflexion politique simplement en partant du statut des femmes africaines, et de la révolte de l’une d’entres elles. L’abjection que suscite en elle cette France de merde ne lui permet-il pas d’avoir enfin un regard critique sur l’Afrique elle-même ?

Et si cette France matricielle faisait aussi une vie misérable à ses propres pauvres ? Et si la France elle-même, de plus en plus inégalitaire dans sa structure, accueillait de moins en moins dignement sa descendance en laissant les riches envahir de leur argent le système d’éducation et d’enseignement de sorte que la meilleure école et les meilleures filières seront toujours pour eux ? Il faut être une femme pauvre pour s’apercevoir que, dans un pays ou un autre, en vérité aucune véritable organisation n’a été prévue pour accueillir la descendance lorsqu’elle est expulsée hors de la matrice. Tout se passe comme si cette matrice était éternelle, les familles riches comme le pays riche faisant office de matrice éternelle. C’est ça qui cloche dans notre pays et qui trompe et attire irrésistiblement nos immigrés… Qui seraient les symptômes de notre mode progressiste de vie inondant d’images pléthoriques la planète entière jusqu’au plus pauvre des pays, y lobotomisant les cerveaux…

La femme africaine du roman, dans ses vicissitudes interminables, s’enfonce dans l’impasse à partir du moment où elle a osé se cabrer contre son sort décidé par la Tradition et par sa communauté : la matrice, ici française, s’appauvrit de plus en plus, et la vérité inéluctable ne pourra bientôt plus être évitée : la mise dehors est proche ! Une femme africaine grosse de ses enfants, et ayant épuisé les différentes « solutions », ayant trop tiré sur la corde des « aides », tandis qu’au pays on tire aussi trop sur l’aide qu’elle doit leur envoyer, est finalement mise en demeure… d’accoucher symboliquement… et peut-être accostera-t-elle au rivage de sa difficile liberté ? En France, un homme blanc lui a déjà fait entrevoir un autre statut de la femme, et ce n’est alors pas l’Africaine en elle qui va avoir cet homme avec les recettes sexuelles des femmes de son pays.

La femme protagoniste de ce drame semble aboutir à une paradoxale sortie du tunnel. Une sorte de retour à la case départ mais en ayant avancé d’un pas de spirale qui annonce un deuxième départ après avoir intégré l’échec du calcul. Une Africaine du Mali détruit avec beaucoup d’humour et de manière colorée voire crue tout ce qui a fourvoyé son destin de femme, ne ménageant pas plus l’Afrique (ici le Mali) que l’Europe. Elle s’attaque non seulement à cette France de merde, où les Africains vivent misérablement dans des foyers Sonacotra mais continuent à faire croire à leurs familles restées au pays que c’est l’Eldorado d’où ils envoient de l’argent supposé gagné facilement. Mais elle s’attaque aussi aux mariages forcés et endogamiques des adolescentes maliennes à des hommes lubriques et polygames beaucoup plus vieux qu’elles qui n’hésiteront pas à prendre quand ils seront lassés une épouse plus jeune. La scène de la vérification de la virginité de la future épousée par des matrones fouillant consciencieusement son sexe est terrible. Elle met en question également le Coran qui promet un ailleurs meilleur justifiant d’accepter les épreuves quotidiennes, mais elle ne renie pas sa foi musulmane.

Khadîdja Cissé, jeune Malienne qui élève seule ses quatre enfants dont un métis, dans le quartier de Château-Rouge à Paris, se trouve dans des difficultés matérielles désespérées. Elle a été licenciée de son travail à la suite de sa liaison avec un homme blanc travaillant dans la même entreprise qu’elle (leurs ébats débordaient sur leur lieu de travail…) et il semble qu’elle a renoncé à en trouver un autre. Elle ne vit plus que des allocations familiales, des aides que veut bien lui accorder une assistance sociale, et des denrées qu’un épicier arabe lui cède lorsqu’elle accepte de soulever sa robe pour qu’il se rince l’œil. L’appartement qu’elle habite est miséreux, c’est celui que son amant blanc père de l’enfant métis a mis à sa disposition, d’abord gratuitement, mais désormais il exige un loyer, qu’elle ne peut payer. Les allocations familiales ne nourrissent pas les enfants mais sont envoyées en grande partie en Afrique, d’où arrivent les demandes incessantes d’argent de la part de la famille persuadée que la France est une vache à lait. L’assistance sociale, en désespoir de cause, menace Khadîdja de lui retirer ses enfants, puisqu’elle ne peut s’en occuper.

Ce passage sur les allocations familiales qui servent à nourrir la famille africaine restée au pays plutôt que les enfants vivant en France est au cœur du drame : une sorte de boulimie de la demande africaine force la mère africaine à jouer de l’état de misère parisienne où elle vit avec ses quatre enfants pour obtenir sans cesse de l’aide, on ne va pas les laisser crever… Or, à force, l’assistance sociale, qui s’écorche à chaque visite les cuisses sur un clou qui dépasse du canapé miteux sous le regard sadique et amusé de la jeune mère africaine qui se venge comme elle peut, refuse de continuer à donner. La demande d’aide a atteint sa limite, et ça finit par casser.

Rien ne va plus pour Khadîdja dans son quartier de Château-Rouge : non seulement l’assistante sociale ne donne plus rien, ni l’épicier arabe, non seulement l’amant blanc ne la loge plus gratuitement et ne quittera jamais sa femme pour elle, mais un de ses fils devient dealer. Ses quatre enfants la jugent mal à cause de sa liaison avec l’étranger et disent qu’elle est une pute. Les voisines africaines s’attaquent à celle qui a désobéi au destin que la Tradition assigne aux femmes et cherchent à voir l’enfant métis forcément un dégénéré. les Sages du foyer Sonacotra organisent une sorte de procès pour la condamner, ils lui crachent dessus.

L’impasse est de plus en plus évidente. Mettant en branle le sort des enfants en parallèle avec celui de cette femme qui est leur mère. Deux questions surgissent, qui ne concernent à mon avis pas seulement les femmes africaines ni leurs enfants. A quel prix une femme, ici africaine, gagne sa liberté ? Et les enfants qui renouvellent la communauté humaine, qui doit en assumer l’élevage et l’éducation jusqu’à ce qu’ils soient libres de leur vie ? Deux questions qui ne sont pas forcément prises sérieusement en compte en Occident non plus…

La force de ce roman africain qui avance entre deux cultures, mettant dos à dos l’Afrique et l’Europe, et faisant aller Khadîdja Cissé entre Charybde et scylla, est de mettre en scène une femme qui, curieusement, est forcée de partir de partout, après avoir mis à l’épreuve à chaque étape la possibilité que son destin soit pris en charge matériellement et sexuellement sans qu’elle ait besoin de dire vraiment « je », alors même que sa désobéissance était déjà un premier « je ». A chaque étape, depuis l’Afrique jusqu’à la France, elle laisse faire la capacité de séduction d’un corps de femme, hameçon attirant à lui malgré elle un vieux lubrique qui l’épousera quasiment de force, puis plus tard l’homme blanc qui pour le sexe préférera la femme noire à sa femme blanche sans pourtant quitter celle-là. Elle laisse faire aussi la capacité de ce corps à engendrer des enfants. Mais toujours, une force résistante en elle la fait s’échapper, si bien qu’aucun de ses enfants, de pères différents, ne lui sert à obtenir d’un homme qu’elle, la mère, soit aussi assumée. C’est vraiment curieux que cette femme, comme conduite par une boussole intérieure très sûre, finit toujours par préférer l’erreur de calcul plutôt que le calcul ! C’est très intelligent !

Bien sûr, l’auteur du roman, Khadi Hane, fait avancer son écriture d’une manière accusatoire. L’intrigue a besoin que la femme africaine en question se pose en victime, dans une France de merde qui fait vivre ses immigrés dans la misère, jusqu’à ce qu’ils aient, comme les cadavres, des fourmis dans la bouche à défaut de nourriture. Personne ne l’aide : pas plus la France que ses voisines africaines, que les hommes africains ou blancs, que sa famille en Afrique si boulimique d’argent, ni même le Coran. Victime de tout, Khadîdja ? Une femme, pour devenir libre, ne doit-elle pas commencer par faire le deuil d’un statut d’assumée dont le destin est déjà tout tracé ? La chute du livre semble curieusement ramener les enfants en Afrique où la mère elle-même poserait la question cruciale : Afrique, que fais-tu pour tes enfants ? Ceci après que cette même mère a refusé que ce soit la France à devoir faire quelque chose pour eux.

En fin de compte, il me semble découvrir un dénouement très intelligent dans ce roman, une proposition très nouvelle, valable aussi en Occident. Comment une femme peut-elle prendre sa liberté, compte tenu que c’est par elle que passe la reproduction de la communauté humaine ? Est-ce qu’un autre pays, supposé riche, doit les accueillir, alors que leur pays d’origine s’en décharge en disant, ici nous n’avons pas les moyens ? Voici une femme qui voit, au bout de l’impasse alors qu’elle ne peut plus espérer de l’aide, les choses autrement. Elle prend la décision de ramener ses enfants dans leur pays d’origine, celui qui doit les accueillir. Comme si ce pays, la femme mère ne lui permettait plus de se défiler. Mais comme si elle disait aussi : ce n’est pas à moi, leur mère, de trouver la solution pour les nourrir, les éduquer ! Une fois qu’ils sont nés, qu’ils sont sortis de moi, c’est à leur pays d’origine, c’est à leur patrie, de les accueillir, puisqu’ils continuent la communauté humaine. Ainsi, la femme se libère aussi. L’assistance sociale, par la menace d’enlever les enfants à leur mère, pour les placer, puisqu’elle ne peut s’en occuper, n’annonce-t-elle pas la coupure ombilicale d’une naissance, alors que c’est devenu trop lourd pour cette mère ?

On comprend mieux alors ce que vise ce roman par la description précise de la misère parisienne de cette mère de famille africaine seule : elle arrive à crier que c’est trop lourd pour elle, cette famille, elle est sur le point de ne plus pouvoir, il n’y a plus d’autres possibilités, la matrice se dessèche, il est temps d’accoucher, d’aller pondre ces petits sur la terre qui en a besoin pour la perpétuation de l’espèce humaine. Cette terre ne peut continuer de faire porter à un autre pays, supposé riche et devant expier la honte de la colonisation, le devoir d’accueillir et élever la descendance. Pleine de quatre enfants que la matrice française intériorisée tel un tissu placentaire ne peut plus nourrir, la mère qui n’en peut plus d’être grosse s’apprête à aller les expulser de son sein sur la terre d’Afrique. A la fin du roman, ce n’est pas écrit, mais on le devine.

Bien sûr, cette écriture est pleine d’indignation. Cette France qui laisse crever. Si froide.

Quelques citations de cette écriture, pour vous donner l’envie d’aller acheter ce roman :

« Nous t’avons fait venir ici, Khadîdja Cissé, parce que tu nous tortures ! Dieu est témoin que tu nous tortures ! Je peux avancer sans me tromper qu’aucun de nous n’a fermé l’œil, depuis qu’on nous a rapporté ta conduite. Honte sur toi, fille de Maîmouna Cissé ! Comment as-tu pu ? / Je ne bronchais pas. Tête baissée, signe de soumission aux mâles. Qu’ils croient que leur loi, qui m’ôtait toute identité personnelle parce que j’étais une femelle, me convenait, que je regrettais de l’avoir enfreinte… Ton grand-père, Hara Cissé, fut un grand guerrier remarquable… Comment as-tu pu traîner son nom dans la boue ? » « La France abîme les femmes, remarqua un autre homme. Jamais mes épouses ne mettront les pieds ici ! » « A la suite de la lettre de mon mari, j’avais végété de maison en maison… j’avais apporté la honte dans ma tribu, parce qu’une épouse honnie avait toujours tort… foutaises d’Africains paumés, menteurs qui n’avaient rien à cirer de cette solidarité dont ils se vantaient, à leurs bavardages d’éternelles victimes, à leur penchant pour l’apparat et l’apparence alors qu’ils étaient aussi creux qu’une cuisse de grenouille… Seul Jacques Lenoir m’avait sortie de la crasse, lavée et apaisée. Il m’avait appris à aimer, à prendre ce que la vie donnait, même si c’était des broutilles. Il était blanc, et alors ?… Dans un murmure collectif, ils m’invitèrent à choisir entre le Blanc et la communauté à laquelle j’appartenais… / Les gens racontaient que j’avais ‘gagné’ un Blanc très riche… elles osent confier leur but inavouable de jour : que le féticheur aide leur fille à rejoindre Paris, que leur fille y ramasse un Blanc et lui pique son argent. / Vous vous rendez compte ! repris Mme Renaud. Mais comment pouvez-vous entretenir qui que ce soit, alors que vous-même ne travaillez pas ? Ils le savent, au moins, que vous ne travaillez pas, n’est-ce pas ? / Je passais des heures à supplier l’Arabe de m’avancer un kilo de riz… sous réserve que sa cliente soit basanée et dotée d’une croupe qui lui plaisait, il cédait illico… / Demande, le ciel te comblera. Dès mon enfance, j’avais fait mienne cette sagesse héritée de mon père, de ma mère, du maître coranique… / Toute maîtresse sensée accepte ce que donne l’élu en attendant de le cueillir, mais le mien était plus costaud que le thon rouge de la Méditerranée. J’avais beau ramer, amorcer, agrainer, l’hameçon ne mordait pas… ‘Démerde-toi toute seule ! est la devise de ce pays de merde’, grondais-je. Mon silence ne faisait que répandre ma rancune envers Paris. Cette ville, sans le savoir, nous avait promis de belles choses… Mais il n’y avait pas de soleil à Paris. »

Alice Granger Guitard



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