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Opération SWAP : Dames de Pique contre Dames de cœur - André Girod.
mardi 17 juin 2014 par Abdelali Najah

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Après « Maires à la dérive », livre fortement contesté, André Girod vient de publier son nouveau roman « Opération SWAP : Dames de Pique contre Dames de cœur » (L’Harmattan, Paris, 2014) qui se déroule au Chili à l’époque du dictateur Pinochet.

Ce livre est un thriller qui raconte l’histoire d’une jeune Française partie étudier à Santiago quelques semaines avant le coup d’état du 11 septembre 1974. Hébergée par la famille de son amie, elle sort avec Jorge, le fils de la famille connu pour ses idées communistes. Le coup d’état de Pinochet qui mène à la mort suicide du Dr Allende va organiser la chasse aux étudiants, syndicalistes et soutien de la gauche. Jorge, sa sœur et la jeune Française sont brutalement arrêtés et internés. Puis, plus de nouvelles sauf la mort de Jorge sous la torture. En France, la famille inquiète tente d’en savoir plus. Alors dans l’esprit du frère et d’un cousin baroudeur s’élabore un plan machiavélique pour sortir la jeune Française des griffes de la DINA, la police secrète de Pinochet. Vont-ils réussir ? Nous suivons pas à pas la mise en place de ce complot. Prenant, surprenant, il tient le lecteur en haleine du début à la fin.

C’est en réalité un fait semblable très peu connu transformé en roman.

André Girod connaît bien l’Amérique du Sud. Il s’est marié en 1960 à La Paz, Bolivie avec la fille d’un général bolivien, directeur de l’école de guerre et ancien commandant de la région où furent capturés Che Guevara et Régis Debray. Longtemps André Girod discuta avec la famille du sort du philosophe français. Ce dernier fut libéré en 1970. L’auteur ne clame aucune influence quant à cette libération. En 1960, André Girod assiste à la Révolution Cubaine à la Havane. Puis, il apprend à connaître le Chili de Pinochet dans les années 74/78.

Exchange or swap ?

Un événement important vient de se dérouler actuellement aux Etats-Unis à savoir le retour d’un soldat américain depuis cinq ans prisonnier des Talibans, en Afghanistan. C’est à la lecture du livre d’André Girod que l’on peut comprendre la guerre sémantique à Washington entre « Republicans » et « Democrats » (gouvernement Obama).
Pour commencer, les deux grands quotidiens américains en l’occurrence le « Los Angeles times » et le « Wall Street Journal » titrent l’événement respectivement « Republicanscriticizeprisoner swap thatfreed Sgt. BoweBergdahl » (Les Républicains critiquent le « swap » de prisonniers qui a libéré le sergent BoweBergdahl) et « U.S.-TalibanPrisoner Exchange Revives Hopesfor Afghan PeaceTalks » (L’ « exchange » d’un prisonnier américain de Talibans relance l’espoir de paix en Afghanistan). La libération du soldat américain le sergent BoweBergdahl lance une polémique à Washington et aux Etats-Unis. Ce retour du prisonnier (était-il vraiment prisonnier selon la convention internationale ?) met en évidence une question sémantique comme l’indiquent les deux titres de journaux américains : Le Los Angeles Times et le Wall Street Journal. Le premier parle de SWAP et le second d’EXCHANGE. Or dans « Opération SWAP, Dames de Pique contre Dames de Cœur » sorti il y a quelques jours, André Girod utilise le mot « swap » plutôt qu’ « exchange ». Pourquoi ? Les Republicans n’hésitent pas à mettre en avant que la manœuvre est un « swap » tandis que le gouvernement Obama avance le mot « Exchange », ce qui est le reflet des deux quotidiens, le Los Angeles Times à tendance plutôt droite et le Wall Street Journal penche vers la version des « Democrats » soit celle d’Obama.

Tout est en réalité une question d’honneur et les arguments des uns et des autres vont dans ce sens.

Pour les Republicains, c’est une grave erreur d’Obama (cela ne peut pas en être autrement pour eux !) et surtout un danger. Obama a cédé devant un chantage de la part des Talibans car le Président avait fait une promesse aux parents du sergent BoweBergdahl, faire revenir leur fils, le seul soldat américain encore prisonnier. Avec de telles négociations, tous les soldats Américains sont en danger d’être enlevés pour être échangés contre des terroristes. Le cas présent montre la faiblesse du gouvernement démocrate. Il a fait libérer un prisonnier contre cinq ennemis. Quant aux défenseurs de cette action plus humanitaire que géopolitique, ils indiquent que l’Amérique n’a jamais abandonné l’un des leurs entre les mains de l’ennemi. Ils balaient de la main le fait que ce sergent avait déserté son camp en mettant la vie de ses camarades en danger lorsqu’ils sont partis à sa recherche en Afghanistan.

Parlons donc sémantique : le mot « exchange » est plus dans la légalité de la convention de Genève concernant l’échange de prisonniers, ce qui se fait à la fin de toutes les guerres. Les Allemands sont rentrés chez eux en 1945 et les Français ont pris le chemin inverse. Il en a été de même après l’armistice signé en Corée.Le gouvernement Obama fait prévaloir une action qui se déroule dans le cadre légitime d’un accord rédigé par plus d’une centaine de pays. C’est la norme entre deux armées, deux nations.

Par contre le mot « Swap » introduit la notion de « magouille », « négociations hors normes », en dehors de toute convention, de toute légalité reconnue. C’est une tractation des plus obscures, des plus mystérieuses qui aboutira à une décision difficilement reconnue aux yeux de la loi.

Dans le livre d’André Girod, le mot « swap » s’applique avant toute autre notion de légalité géopolitique. C’est une lutte entre deux groupes, chacun détenant des prisonnières appelées plutôt « otages », saisies illégalement et de manière brutale de façon à faire céder l’autre partie. Un combat souterrain sans aucune intention politique. D’un côté, une dictature qui dans son déchainement de violences a arrêté une jeune Française innocente qui était présente par hasard et la famille de cette dernière qui en kidnappant les filles d’un des pires tortionnaires du régime peut au moins négocier la libération de cette Française. Rien à voir avec une guerre « légalement » déclarée et des armées bien identifiées avec uniformes et rangs.

La question soulevée alors à Washington est de savoir si les Talibans sont considérés comme membres d’une armée régulière ou bien des terroristes ? Les Démocrates (Obama) parlent de la « guerre en Afghanistan » comme définie par la Convention de Genève et les Républicains pensent que c’est une lutte farouche contre le terrorisme, ce que pensait le gouvernement Guy Mollet des attentats en Algérie en 1956/7. La France a eu du mal de parler de la répression en Algérie comme une « guerre » mais plutôt comme une affaire de sécurité. C’est pour ces raisons même qu’André Girod a personnellement refusé de partir en Algérie car cette décision était au début une affaire de sécurité pour les habitants de l’Algérie que pour les habitants de la métropole. Chaque camp détenait non pas des prisonniers de guerre mais d’otages terroristes d’un côté et « policiers » de l’autre.

En réalité pour conclure, combien de guerres et de sérieuses disputes sont dues à une question de vocabulaire et de sémantique ? En voilà un très bel exemple !



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