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Anna M., de Michel Spinosa, France, 2006
dimanche 17 février 2008 par Salim Mokaddem

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Une jeune femme, reliant à la Bibliothèque nationale des livres rares et anciens, vit avec sa mère. Cette dernière n’introduit dans l’espace vital aucun être masculin, au point qu’Anna est née sous X, comme nous l’apprendra un plan court incident lors d’une scène d’internement psychiatrique. En effet, la jeune femme (Isabelle Carré), Anna, s’éprend de façon possessive, paranoïaque, furieuse, démente, d’un pauvre chirurgien, Zanevsky (Gilbert Melki), qui voit sa vie fortement dérangée par le délire interprétatif de celle qu’il a soignée après qu’elle eût été victime ( ?) d’un accident de la route. Anna s’immisce dans la vie professionnelle, conjugale, du chirurgien de Sainte-Anne (beaux cadrages à la Piranèse dans l’Hôpital) et contraint ce dernier à quitter domicile et lieux usuels de vie, du fait de l’intrusion de plus en plus violente et agressive de la fantasmatique angoissante de la folie.

On a comparé ce film à celui d’Hanecke, La pianiste. On devrait plutôt penser à Kafka ou à Artaud, pour la cohérence logique et la pertinence formelle du cadre de la démence féminine : la sexualité non sexuée d’Anna renvoie à l’incapacité de penser sa venue au monde et le sens de la naissance et de la mort, en un univers totalement assujetti à l’amour sans corps, sans paroles assignées, sans autre (père, amant, ami, etc.) masculin. Le réalisateur Michel Spinosa, géomètre-cadreur, révèle, par plans fixes, emboîtements de portes/fenêtres et cadrages impeccables, une mathématique du délire analogue à un théorème du désir : on n’a pas besoin de l’autre pour aimer, à condition qu’il ne s’incarne jamais dans le point de fuite du réel de l’amour.

Ce film, très bien interprété, parle de la solitude angoissante jusqu’au crime possible, d’une femme qui ne sait pas ce qu’est être une femme dans un univers où l’imaginaire de l’amour se réduit à la masturbation d’un corps marqué par le non-savoir de soi et le narcissisme de sa mise en scène. Anna qui n’ « m’ » qu’elle-même, n’est-ce pas aussi le destin de celle qui rentre dans la toute-puissance véhiculée par les leurres et les faux-semblants d’une vie de pure fiction ? L’illusion contrariée d’être l’élue, l’aimée, l’unique, apparente Anna à une mystique. Beaucoup retrouveront là les raisons d’une Passion amoureuse menant à la folie de la haine ordinaire.

Salim Mokaddem

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