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Monologue avec Rachid Boudjedra

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mardi 15 février 2005 par Mokhbi Abdelouahab

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Beaucoup d’écrivains algériens d’expression française abordent des thèmes qui se superposent aux clichés que la société, dans laquelle ils se sont le plus souvent volontairement expatrié, véhicule sur la société dont ils sont originaires. Boudjedra, qui exaspère parfois par son manque d’humilité et suscite la colère quand il prétend "écrire algérien".

Littérature Algérienne d’expression française :

Monologue avec Rachid Boudjedra

Boudjedra est venu, à la mi-décembre 2004, assumer devant les étudiants et les enseignants de l’université de Mostaganem son statut de transgresseur de tabous. "L’icône" de la littérature algérienne post-indépendance était bien là ! Certains ont même cru devoir souligner pour l’assistance estudiantine, subjuguée par l’aura de l’auteur de la répudiation, le plus provocateur des écrivains algériens était bien là devant elle "en chair et en os" ! La précision était aussi utile pour les quinquagénaires comme moi qui auraient pu être troublés par le nouveau look de la star du jour. En effet, la crinière si caractéristique de Rachid Boudjedra a disparu. Elle lui allait si bien tout en suppléant avantageusement à sa calvitie avancée et frontale. J’ai du me reprendre par deux fois pour discerner l’escargot entêté sous le crane rasé. Une voix intérieure m’a presque effrayé en s’exclamant : "Mon Dieu ! Que les années passent vite !" Du coup, me voilà réconcilié avec le blanc qui embrase ma propre tignasse.

Pour mettre en exergue la spontanéité de l’échange qu’il voulait avec la salle, Boudjedra a rassuré tout le monde sur le fait qu’il n’a rien préparé. En réalité, les réponses aux questions d’un public bon enfant constituaient autant d’éléments d’un discours bien rodé et défraîchi. La frustration de ne pouvoir véritablement débattre avec le plus emblématique des écrivains de la littérature algérienne post-indépendance allait en s’accentuant au cours des échanges quasi-épistolaires.

Beaucoup d’aspects importants relatifs à l’écrivain d’abord puis à son rôle en tant que citoyen porteur d’opinions politiques ont été discutés. Des jugements surprenant ont été formulés sur des écrivains algériens ou arabes comme Kateb Yacine ou Naguib Mahfouz. Selon Boudjedra, on prendra soin de ne pas lui faire dire ce qu’il n’a pas dit, l’auteur de Nedjma (1956) se serait fourvoyé dans des productions très médiocres du théâtre populaire à Sidi-Bel-Abbès. J’ai un souvenir ému d’une pièce extraordinaire de Kateb Yacine , la guerre de 2000 ans, jouée sur la scène du Cinemonde à Mostaganem au milieu des années 70. C’était une synthèse spatio-temporelle magnifique des luttes de peuples aussi différents que peuvent l’être les Vietnamiens et les Chaouis des Aurès. Leur dénominateur commun se cristallise autour de leur résistance à toutes les formes d’impérialisme et d’oppression . La pièce se termine par l’Internationale d’Eugène Pottier. Enthousiasmé, le public mostaganémois entonne, à l’unisson avec les comédiens, le plus allégorique des chants révolutionnaires. Le drapeau rouge est déployé sur la scène. Ce ne fut pas banal ! Nous sommes tous un peu revenu de cette révolution, mais Kateb Yacine restera pour beaucoup celui qui ne craignait pas de côtoyer les petites gens. N’en déplaise à Boudjedra, l’oeuvre de Kateb Yacine exhale un parfum de sincérité et d’authenticité dont le seul souvenir évoque la nostalgie.

Quant à Naguib Mahfouz, référence incontournable de la littérature arabe, il aurait reçu le prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre en 1988 qu’en récompense à son allégeance au président Sadate et à la caution intellectuelle qu’il apporta aux accords de Camp David. Boudjedra en est convaincu et du coup il profite pour classer l’œuvre du penseur et écrivain égyptien aux rayons de la bibliothèque verte. C’est un peu court. Comme sur plein d’autres sujets, Rachid Boudjedra dit toujours trop ou pas assez. Il n’y va avec le dos de la cuillère. Il a le mérite d’être clair mais ne s’embarrasse pas d’argumenter ses opinions. Elles deviennent souvent des doctrines esquissées très approximativement.

A propos de linéarité dans la narration.

Mais avant de revenir sur les fantasmes et paradoxes chez Rachid Boudjedra commençons par corriger une grosse inexactitude commise par un des universitaires présents à la tribune. Bien sûr les propos des enseignants pour accueillir et présenter le grand romancier algérien qu’est Rachid Boudjedra et son œuvre furent, comme de juste, élogieux voire même un tantinet laudateurs, soit ! Mais se laisser aller à conclure la rencontre en attribuant au héros du jour un rôle précurseur dans la littérature algérienne de la narration non linéaire, voilà qui est moins élégant. Le néophyte que je suis conserve dans ses rudiments scolaires que c’est Kateb Yacine, avec Nedjma, qui fut le premier écrivain algérien à être comparé à William Faulkner (1896-1962), immense figure de la littérature américaine du XXe siècle. La similitude entre les deux écrivains résidait justement dans ce style littéraire très particulier et la progression typique qu’il imposait au roman. Ce style particulier est inhérent à l’adoption de la technique du monologue intérieur, utilisée pour la première fois au début du XIXe siècle dans le dessein de supplanter la réalité subjective et objective, en révélant une suite d’états de conscience éprouvés par une personne quelconque, souvent sans suite logique, comme dans la pensée réelle. Faulkner a énormément développé cette pratique littéraire qui fut magistralement imposé par l’écrivain irlandais, James Joyce (1882-1941) dont l’œuvre (Ulysse, 1922 ; Finnegans Wake, 1939) exploite notamment les ressources du monologue intérieur.

Sexualité et littérature

Sexualité et érotisme sont des mots qui reviennent souvent dans l’écriture et le discours de Boudjedra. Auréolé par la reconnaissance internationale pour son talent incontestable de romancier et sa sélection par un mécène italien au sein des dix plus grands écrivains vivants du 20e siècle, il s’en est allé reprocher à Nedjmade Kateb Yacine son érémitisme sexuel. Même s’il a jugé nécessaire de préciser qu’à l’inverse de Kateb, il est titulaire d’un diplôme universitaire, ce qui est puéril au regard de la stature des deux hommes, cela ne l’autorise pas à débiter des inepties comme autant de vérités. Boudjedra a toujours prôné son droit d’introduire du sexe dans ses écrits pour offrir à son lecteur de la sensualité. Il répète depuis déjà tant d’années que l’art d’écrire requiert d’accorder une importance égale au contenu et au contenant. Soit ! Là où Boudjedra s’égare c’est qu’il oublie que si Kateb Yacine n’étale pas la sexualité de Nedjma c’est tant mieux. Nous sommes en 1956. En plus, cette discrétion ou cette pudicité lui permet d’incarner un espoir commun à beaucoup d’hommes et de femmes de l’Algérie de 1956. Nedjma n’est pas un réquisitoire contre la société comme la répudiation. L’absence de sexualité chez Nedjma n’a jamais nui à l’œuvre de Kateb Yacine. L’héroïne n’est pas cloîtrée en dehors de la vie. Elle était convoitée par une multitude d’hommes différents pour lesquels elle est devenue un symbole presque vivant de l’idée qu’ils se font de la liberté. Nedjma n’a nul besoin d’exhiber ses seins. C’est à chacun de l’accueillir dans ses rêves avec les plus impudiques des pensées. D’où le trouble qu’elle fait naître chez les deux frères Mourad et Lakhdar. La sensualité, c’est aussi cela ! Pour le reste tout le monde conviendra avec Rachid Boudjedra que la lecture est d’abord un plaisir. "Prendre un livre s’y plaire et s’y plonger" dit joliment et simplement Victor Hugo.

La trinité taboue.

La volonté de casser la trinité taboue de la littérature algérienne et arabe, constituée par la religion, le sexe et la politique est affirmée avec beaucoup de force. La haine accumulée contre un père tyrannique et féodal par l’aîné de trente-six enfants, ayant souffert de l’humiliation faite à sa mère, première épouse d’un homme quatre fois polygame semble encore intacte. La blessure est apparemment toujours béante et la douleur toujours aussi éprouvante chez l’écrivain. Les traumatismes subis par le malheureux jeune Rachid Boudjedra ont certainement généré chez lui un besoin d’écrire irrépressible. Ils ont aussi fortement orienté la thématique de l’écrivain. Une fois ce constat fait, la thématique tout aussi provocatrice que l’écriture elle-même deviennent plus compréhensible. Cependant le fait que l’écriture, vécue comme une pratique thérapeutique par Boudjedra, reste vaine pour le guérir du traumatisme fondateur soulève des questions troublantes. Pourquoi cette propension initiale à investir ce fameux polygone interdit de la littérature ne s’est-elle pas émoussée ? L’esprit provocateur s’est-il transmuté en une sage mise en conformité de la thématique avec les stéréotypes que la société française, où il est principalement édité et donc lu, véhicule sur la société arabe et musulmane d’où il est originaire et sur laquelle il écrit ? En l’écoutant, je n’ai pas pu m’empêcher de repenser à cette scène terriblement déformante de la réalité de la société algérienne du film de Lakhdar Hamina, le Vent de sable (1982). Le lauréat de la palme d’or du festival de Cannes pour Chronique des années de braise, dont Boudjedra est aussi scénariste, s’appesantit longuement sur l’inhumanité de la société algérienne. Souvenez-vous de cette femme, abandonnée par sa belle-mère, se tordant dans d’atroces douleurs pour accoucher dans des conditions bestiales. Dépité d’apprendre que le bébé est une fille l’irascible mari rentre à la maison pour battre sa femme. La séquence est insupportable de cruauté. Questionné sur l’invraisemblance de cette barbarie ainsi mise en scène, Lakhdar Hamina justifie la scène par le fait qu’il a personnellement connu au moins un cas similaire. C’est sidérant d’irresponsabilité ! A-t-on vu un écrivain ou un cinéaste japonais faire passer, à travers la réalité d’un fait divers d’un malheureux étudiant, la gente masculine nippone pour des découpeurs invétérés de leurs petites amies hollandaises pour les faire frire et les déguster ?

Obsession de plaire ?

Boudjedra est rentré en littérature avec âme et bagages. C’est à dire avec beaucoup de sincérité et une réelle obsession de se dire. C’est, affirme-t-il, cette prédisposition à s’assumer avec franchise qui l’a amené à l’écriture. En dépit de la diversité des sujets abordés, le seul thème de sa littérature c’est lui-même. Son traumatisme central du sang, la haine du père, l’amour de la mère sont ses forces motrices. Si bien qu’il dit lui-même " j’ai l’impression d’écrire à chaque fois le même livre" On pourrait même résumer sa production par une phrase "moi, Boudjedra !"

Un de ses romans relativement récent Timimoun (1994) aborde l’homosexualité. Boudjedra s’attaque à l’exclusion qu’elle engendre au sein de la société. Plus que provocant, le sujet est déconcertant ! Rachid Boudjedra choisi le moment où la société s’essaye à guérir ses maux avec des mots en parlant de réconciliation et d’amnistie pour nous dire la témérité qu’il a eu de commettre un livre dont la thématique est aux antipodes des préoccupations majeures et graves d’une société convalescente. Si, en Algérie, la présence de l’homosexualité est indéniable, elle reste anecdotique. Le sort et le traitement que la société réserve à l’homosexualité ne constitue ni ne pose pas un problème particulier pour les Algériens. Le poser maintenant n’est ni opportun ni pertinent.

Mohamed Dib dont une partie essentielle de l’œuvre a accompagné le mouvement national de lutte contre l’oppression coloniale disait " une œuvre ne peut avoir de valeur que dans la mesure où elle puise sa sève dans le pays auquel on appartient, où elle nous introduit dans un monde qui est le nôtre avec ses complexités et ses déchirements" s’agissant de Boudjedra, on reste très dubitatif sur l’ancrage de ses racines. Se nourrissent-elles de ce besoin vital d’écrire pour traduire de manière sophistiquée les angoisses et les espérances de son pays ou bien est-il mu par l’obsession de plaire à ceux qui l’on fait figurer parmi les dix meilleurs écrivains vivants du siècle ? Dans quel cas, ses livres se vendraient-ils en plusieurs millions d’exemplaires qu’ils ne constitueront jamais une œuvre.

Intellectuel ou doué d’ubiquité ?

L’intellectuel Boudjedra souffre-t-il d’une implication médiatique plutôt discrète dans les questionnements décisifs que la société algérienne doit résoudre, par comparaison à un Rachid Mimouni qui était, de son vivant, médiatiquement omniprésent ? Pour la petite histoire, Rachid Boudjedra n’a pas une grande opinion sur le travail de Mimouni ni d’ailleurs sur celui de Benhadougga ; se sont, dit-il, des écriveurs de discours. La réponse de Rachid Boudjedra arrive comme un smash au volley-ball. Il refuse le statut d’intellectuel et de penseur. Il se suffit d’être le romancier qu’il est. On se surprend à penser à cette manière dont William Faulkner aurait aimé qu’on résume sa vie : « Il écrivit ses livres et mourut ». D’ailleurs, il persiste à expliquer longuement qu’il fait le distinguo entre le citoyen, le militant des droits de l’homme, l’homme des convictions politiques clairement énoncées et l’écrivain qu’il est. Il n’est pas philosophe dit-il même si la philosophie correspond au profil de sa formation initiale.

Accordons à notre géant de la littérature ce don d’ubiquité qui lui permet de gérer hermétiquement ses différentes facettes d’homme, de citoyen et de romancier. Mais alors, quel statut endosse-t-il pour promulguer ses sentences sur la société algérienne ? Rappelons certaines d’entre-elles. "L’Algérie a toujours été une terre de gens humiliés"1 "Bien avant Pascal, il y a un texte du Prophète Mohamed qui disait : « Dieu garde-moi de mon Je. » Je crois que c’était assez grave comme situation, ça donnait une société musulmane objectale, donc cachée et sclérosée. Morte. Mortifère"2 ou encore " Cette façon de réduire la religion à une série de dogmes et de rituels mécaniques était révoltante. Cela avait donné et donne encore une société hypocrite où tout se passe dans les arrière-boutiques, dans les arrière-cours et où le mensonge est érigé en dogme absolu et sécrétait une nuisance incroyable. J’ai connu une société algérienne figée, avec quelque chose de préfabriqué, de lourdement et massivement réifié"3 c’est une évidence, les jugements sont excessifs, dénués de toute nuance et amenés sans une analyse crédible. Rachid Boudjedra fait abstraction de l’histoire et énonce des diagnostics sans appels sur la société algérienne comme autant de résolutions du politburo du défunt PCUS. Il est presque superflu qu’il pérore sur sa fidélité au communisme, tant l’énoncé sans nuance des ses opinions fait de lui l’archétype du militant primaire d’ un quelconque parti unique. Si nous ôtions à ces thèses la notoriété du romancier, elles apparaîtraient plus nettement pour ce qu’elles sont : Un tas d’insanités proférées iniquement à la face de la société. C’est l’attitude même du révolté, qu’il prétend être, qui suscite de la colère.

Sur l’amnistie générale, corollaire de la politique de réconciliation nationale envisagée par le président algérien Abdelaziz Bouteflika, la réponse de Boudjedra à une question d’une étudiante, jaillit des tripes, un peu péremptoire et sentencieuse " je n’ai pas écris le FIS* de la haine pour en arriver à admettre une telle issue". A qui conviendra-t-il d’attribuer cette déclaration faite ce jeudi 16 décembre devant les étudiants mostaganémois ? Au citoyen, au militant ou à l’écrivain qui expliqua d’emblée qu’il ne faisait pas de politique dans ses romans. Logiquement, il ne devrait pas leur faire de la politique, non plus ! Les choses finissent par paraître si abracadabrantes que, depuis, je me taraude la cervelle pour trouver la définition du fait politique et de la politique chez Rachid Boudjedra. Dites- moi ! Suis-je un cas ?

Il existe plus d’un paradoxe chez Rachid Boudjedra. "j’ai été rebelle au père : Cela a donné la nécessité et l’urgence d’écrire" . C’est clair. En l’écoutant on comprend vite que Boudjedra s’est muré dans la haine du père jusqu’à ne plus être capable de pardon. Lui-même explique que ce terrible sentiment l’habite irrémédiablement. Le constat ne justifie pas de commentaires particuliers. C’est un vécu intime. Malgré l’immense talent de l’écrivain, le lecteur ne pourra donc jamais s’immiscer et se forger un jugement. Cependant qu’un auteur de la maturité de Boudjedra persiste à transposer cette haine à l’ensemble de la société et à toute forme de pouvoir est discutable. Percevoir la réalité d’une société, forcément complexe et multiple à travers un vécu singulier et restreint finit par peser et choquer. L’urgence d’écrire après tant d’années doit céder la place à davantage de réflexions et d’idées plus élaborées. C’est un autre authentique poète, Sénaquien (du cercle de Jean Sénac) de premier ordre, aujourd’hui enterré puis oublié, Youssef Sebti, qui disait " Chez nous il est toujours urgent de faire, aujourd’hui il est urgent de réfléchir" Ces paroles retrouvent toute leur fraîcheur dans mon esprit quant je suis assailli par les incohérences du discours de Boudjedra le plus poète de nos écrivains, dit-on.

Ecrire algérien

Ecrire algérien est une ambition, une revendication forte et peut-être même une autre obsession chez Rachid Boudjedra. Mais d’abord, essayons de restituer son autoportrait. Il est Freudien mais en matière de psychanalyse qui oserait en renier le père. Il est marxiste ou même communiste. Et là, on comprend bien que sa révolte contre le féodalisme du père exige un fondement idéologique. Cependant, on reste dans l’expectative quant à la portée de son adhésion aux idées de Marx. Adopte-t-il le marxisme en tant que philosophie c’est-à-dire le matérialisme scientifique ou ne retient-il du marxisme que son expression politique, c’est à dire le marxisme-léninisme ? Mais est-ce utile de chercher la réponse ? Je soupçonne, même, Boudjedra d’entretenir sciemment un flou artistique autour de sa pensée. Ainsi, il lui est loisible de ne pas assumer pleinement ses idées. Il fut révélé à lui-même par Bettelheim. En effet, le fantasme central du sang est rattaché, chez lui, entre autres à l’ " Horrible mutilation (circoncision) pour un enfant de sept ans"2 C’est en lisant Bettelheim qui "en tant que Juif lui-même, donc circoncis"3 avait bien analysé ce problème de la circoncision et de l’excision. La haine, tout est prétexte à haïr chez Rachid Boudjedra, qu’il porte au sacrifice rituel du mouton de l’Aïd El-Kebir "J’ai toujours haï cette tradition sanglante" participe aussi de ce fantasme du sang. André Brincourt du figaro littéraire sous le titre l’amour de la haine soutient que "Décidément, le roman de Rachid Boudjedra répond à la pensée même de Bernard-Henri Lévy : « La vraie guerre des civilisations est celle qui est intérieure à l’islam. »4 . Quelque soit la pertinence du journaliste à propos du livre les funérailles, il est troublant qu’il puisse relever que les fatwas de Rachid Boudjedra sur l’Islam rejoignent celles de BHL. Légitimement, on finit par s’interroger sur ce que l’écriture de Rachid Boudjedra recèle d’algérien. On retiendra tout de même qu’il ne s’est pas trompé dans le choix de la rampe de lancement qui lui fera bien décrocher un jour le prix Nobel. Pour la concision de ses phrases, la fluidité de sa narration, il le mériterait certainement. A cause de la haine qu’il s’obstine à cultiver, j’en suis moins sûr. Mais quand il accuse les Algériens d’être incapables du don de soi et de vouloir indûment le paradis, lui qui se complait dans l’enfer du fils de la haine, du fils de son père, je crois qu’il l’obtiendrait que cela m’indifférerait royalement.

Références :

1. Rachid Boudjedra "La fascination de la forme "Le Matin 24 juin 2003.

2. Rachid Boudjedra " Ecrire pour atténuer la douleur du monde" Le Matin 17 juin 2003.

3. Rachid Boudjedra conférence prononcée à l’université de Princeton (USA) en février 1992. Le Matin 29 janvier 2003.

4. André Brincourt " L’amour de la haine", Le Figaro Littéraire 26 juin 2003

*FIS : Front Islamique du Salut, dont la dissolution a suivi l’arrêt du processus électoral de décembre 1991.



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