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L’effritement, roman de Pierre Louis Aouston

Paru aux Editions de Bonne Heure (E.D.B.H)

mercredi 22 novembre 2023 par Françoise Urban-Menninger

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Pierre louis Aouston, poète, performeur dans les mouvements de la parole, écrit dans une société dont il se sent à l’écart, il l’explore en marchant car "ses pieds lui laissent la liberté de la contemplation". Et si l’auteur marche, il le fait au propre comme au figuré car il avance en lui-même, s’interpelle pour analyser sa démarche dans ce premier roman qui procède de l’autofiction.

Pierre Louis Aouston écrit "Je me transportais avec des pensées sur le chemin d’un songe, mes pensées s’agitaient, couraient...", plus loin, il ajoute "je ne me voyais plus marcher, je marchais en rêverie, je marchais en dormant". Ce livre, où nous marchons avec son auteur, produit sur le lecteur un sentiment d’empathie qui invite le lecteur à pratiquer également une forme d’introspection. Et chacun d’entre nous, de songer au livre posthume de Jean-Jacques Rousseau Les rêveries d’un promeneur solitaire où l’écrivain décide d’écrire sur lui, de rédiger ses pensées dans l’ordre où elles viennent.
Pierre Louis Aouston déambule dans les rues de Strasbourg, le monde s’invite dans ses réflexions, madame Covid surgit, impose sa kyrielle de contraintes dont le masque déshumanisant. On assiste alors à une forme de servitude volontaire déjà dénoncée par l’auteur dans sa critique d’une société consumériste. C’est ce monde en pleine déliquescence, où de nouvelles guerres éclatent, qui donne son titre à ce livre, car L’effritement d’après la définition de l’Académie française répond au fait d’être réduit et d’entamer une lente désagrégation en menus débris et en poussière.
La mort omniprésente accompagne le marcheur comme elle le fait pour chacun d’entre nous mais l’auteur dans son extrême solitude en a une conscience aiguë qui lui fait dire qu’il se sent "foudroyé par une solitude froide qui tétanise mon corps" et de résumer avec lucidité dans son épilogue "Je marche, je marche, oui je marche ; vers la mort".
Si l’on est pris à la gorge par l’angoisse existentielle de l’auteur comme dans La Nausée de Jean-Paul Sartre, où Roquentin, le narrateur, s’assume homme, c’est à dire rien, on trouve chez Pierre Louis Aouston des moments lumineux qui s’apparentent à de purs instants de grâce. Car la marche le libère de toutes les contingences "je vole à quelques centimètres au-dessus du bitume dans la solitude du marin au-dessus de l’océan", elle génère également de belles rencontres, aussi furtives soient-elles, qui viennent rompre cette solitude qui nous renvoie tous à notre échéance inéluctable. Dans ce livre à nul autre pareil, Pierre Louis Aouston s’emploie à "Déterrer avec plaisir ces moments si beaux" où la marche lui permet de reprendre pied dans ce monde où l’écriture distille son lot d’amertume et de bonheur car dans la dernière phrase du roman, il conclut avec philosophie "Elle tourne, la planète, les hommes aussi. Voilà tout."
De superbes images en noir et blanc, prises par l’auteur, accompagnent ses pérégrinations et les nôtres à travers la ville, nous plongeant dans l’entre-deux d’une rêverie éminemment poétique.

Françoise Urban-Menninger

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