Ouvrage paru aux Editions Andersen
mercredi 8 novembre 2017 par Françoise Urban-MenningerPour imprimer
Publié dans la collection "Confidences" sous la direction d’Olivier Larizza, ce récit autobiographique dédié à son enfance est le premier livre d’écrivain de Claudine Malraison par ailleurs connue pour ses talents de peintre.
Gérard de Nerval écrivait dans Les filles du feu que "Les souvenirs d’enfance se revivaient quand on atteignait la deuxième moitié de sa vie", Claudine Malraison ne fait pas autre chose en renouant avec ses souvenirs engrangés dans sa mémoire.
Et ses réminiscences sont parfois également les nôtres, les petites choses de la vie, leur parfum, leur pouvoir émotif, affleurent sous les mots et nous touchent dans notre subconscient. Chaque détail aussi infime soit-il, renouvelle la magie d’une petite madeleine de Proust telle cette briquette enveloppée dans du papier journal afin qu’elle conserve jusqu’au matin des braises dans la cuisinière. On retrouve sur la langue et sous le palais, le goût du lait caillé qui se forme à la surface du bol, cette sensation particulière au fond de la gorge lorsqu’on y appliquait du bleu de méthylène pour apaiser le feu d’une angine.
Tous ces petits riens du quotidien qui sont en fait la quintessence même de la vie, composent la trame d’un monde aujourd’hui en passe de disparaître. En cela ils sont des témoignages précieux et font oeuvre d’ethnologie pour les plus jeunes !
Mais derrière cet univers de l’enfance où l’auteure évite les travers de l’idéalisation, on pressent les turbulences de l’Histoire avec un grand H où les récits personnels, les drames surgissent et s’entrelacent. Les grandes guerres, les tragédies particulières d’une Alsace meurtrie y sont évoquées entre les lignes...
Mais le souvenir le plus prégnant demeure bien évidemment la disparition de la mère de l’auteure. Claudine Malraison en parle avec tendresse et pudeur :"Maman est morte...Il en aura fallu du temps pour que ça sorte. Comme la grosse arrête qu’on a arrachée un jour du fond de la gueule de Katy avec une pince."
Et ce sont encore avec des images de l’enfance que l’écrivaine décrit ce souvenir toujours douloureux qui lui reste en travers de la gorge...
Ce petit livre à lire d’une seule traite puis à reprendre pour le plaisir tel un livre d’images est indéniablement celui d’une voix, celle de l’enfant qui ne demande qu’à s’exprimer en chacun (e) d’entre nous. Claudine Malraison nous permet d’y appréhender cette "cosmicité de l’enfance" si bien définie par le philosophe Gaston Bachelard et dont il affirmait qu’elle nous offrait des "réalités psychiques ineffaçables qui inspirent les grands rêveurs" et d’ajouter dans sa Poétique de la rêverie que "ces derniers n’ont de cesse de nous apporter des lueurs".
Françoise Urban-Menninger
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