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Journal d’un timonier - Nikos Kavvadias
mercredi 19 septembre 2018 par penvins

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Vous retiendrez facilement le nom de la maison d’édition, Signes et Balises, voilà, vous y êtes, vous êtes en mer avec Nikos Kavvadias et vous y êtes sur un navire grec, prêts pour la traversée vers les mers de Chine.
Ceux qui aiment la mer avec passion, cela a été prouvé, ne peuvent jamais en faire leur métier.
Ne vous attendez pas au romantisme d’un aventurier des mers, Kavvadias vous plonge dans l’envers du décor.
Mon romantisme je l’ai vu mourir de mes propres yeux à l’intérieur des proues puantes et crasseuses et dans des chambres blafardes, habitées par de sinistres putains.
Kavvadias le dit bien, il est de ceux à qui la mer donne le vertige. Ces nouvelles disent à quel point il ne s’habitue pas à cette vie de marin :
Ce timonier est très différent de moi parce qu’il attend quelque chose il espère en quelque chose. Une lettre de chez lui. Moi, je n’attends rien de ce genre. Un tel bonheur n’existe pas pour moi. Lui, il attend qu’on accoste ; il débarquera et ira s’amuser pour oublier sa journée infernale. Mais moi, je ne vais jamais à terre.
Contrairement aux « écumeurs de grève » auxquels il se compare, Kavvadias, campe des marins qui restent toujours en mer, qui ne débarquent pas pour s’amuser. Dans une de ces nouvelles, le marin contemple Capo di Faro (Cap Peloro) sur le rivage de la Sicile mais insiste pour dire qu’il n’est jamais descendu à terre pour visiter le village et que de même qu’il regarde de loin cette bourgade il songe aux jeunes Siciliennes qui regardent passer les bateaux. Ailleurs à propos de Cavafy que le marin aurait tant aimé rencontré il dira :
Tout homme doit garder en lui un désir inassouvi. Tout homme doit garder quelque chose qui continue de le hanter…

Kavadias est né en Chine, et c’est peut-être là-bas que se trouve ce qui le hante, et qui nourrit un romantisme inavouable.
Je n’ai jamais aimé de ma vie et n’aimerai jamais.
Ou bien :
Parfois je me dis que tout est mort au fond de moi [ … ] Et d’autres fois encore, je crois posséder au fond de moi la beauté et la pureté qui manquent au monde…
Dans la première nouvelle, celle qui donne son titre au recueil, Kavvadias écrit :
Quoi qu’il en soit, il me semble que toutes les femmes sont quasiment une seule et même chose.
Plus tard dans son unique roman, Le Quart, le radio avouera au pilotin qui lui dit qu’il n’a pas dû s’embêter :
Non. Jamais à la mer. Depuis vingt ans que je navigue sur la ferraille, je n’ai jamais souillé ma couchette. Je dis que ça me flanquerait la poisse.
Ainsi se dessine le portrait d’un homme qui dit avoir perdu tout romantisme, mais dont on peut penser, au contraire, qu’il est hanté par cette pureté qui manque au monde incapable d’aimer une femme – une autre femme que la mer - rongé de culpabilité, imaginant qu’on le désigne pour remplacer un mort et grimper à sa place au sommet du mât, décrivant dans une autre nouvelle qui restera inachevée, une sorte de fantôme tombé du ciel accroché lui aussi au sommet du mât. Nous ne saurons pas ce que veut dire Kavvadias quand il écrit :
et maintenant patient lecteur, si tu es arrivé jusque-là, accorde toute ton attention.
La nouvelle reste sans suite. Kavvadias aura donc écrit bien plus qu’un seul roman, ainsi que le souligne Gilles Ortlieb dans sa postface, il aura aimé passionnément la mer et nous aura laissé un témoignage magistral de la vie mes marins.
Merci aux éditions Signes et Balises et à la traductrice de nous avoir donné accès à ces pages du patrimoine grec.



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