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La golf blanche de Charles Sitzenstuhl

Roman publié aux éditions Gallimard

dimanche 15 mars 2020 par Françoise Urban-Menninger

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L’auteur de ce premier roman biographique, aujourd’hui âgé de 32 ans, a passé son enfance et une partie de son adolescence dans un climat de terreur généré par la violence incontrôlable de son père. On pénètre d’emblée avec l’auteur dans un huis clos familial à l’atmosphère délétère où le père tyrannise son épouse et ses enfants, les humilie en permanence, puis remet son masque de respectabilité à l’extérieur du foyer familial...

Charles Sitzenstuhl, à ce jour conseiller politique d’un ministre, retrace d’une plume acérée, trempée dans la lie de souvenirs douloureux, son historique familial qui trouve ses racines dans sa ville natale à Sélestat. La rencontre de ses parents se fit dans cette ville paisible où sa mère , future institutrice, revenait tous les soirs durant ses études à Strasbourg. Elle y rencontra son futur époux, un Allemand qui travaillait chez un fabricant de cuisines allemand implanté en Alsace. L’auteur relate que très vite sa mère tomba amoureuse de ce "jeune homme séduisant" et que "son accent allemand lui donna un-je-ne-sais-quoi de mystérieux" mais très vite, au fil des pages, Charles Sitzenstuhl caricature cet accent qui devient la marque d’une fureur irrépressible.
Oma, la grand-mère paternelle allemande prolonge en écho les interdits paternels qui confinent à l’absurde :"Nein Charles ! Verboten ! Absolut Verboten !".
Et le petit Charles auquel le père refuse d’apprendre l’allemand car " en France, on parle français" mais qui s’indigne parce que son fils ne parle pas l’allemand avec ses cousins de l’autre côté du Rhin, de vivre dans une angoisse qui s’exprime à l’école sous la forme de brutalités envers les autres enfants, fermant ainsi la boucle silencieuse de son oppression. Le père régente la vie familiale jusque dans les moindres détails, traite à tout bout de champ son épouse de "connasse", humilie son fils Charles pour des broutilles, et va jusqu’à lui infliger des sévices particulièrement cruels. C’est ainsi qu’il le jette à la rue sous la pluie, n’hésite pas à le rouer de coups...
Mais le pire, c’est le jeu insensé que le père mène au volant de sa golf blanche. A l’instar de la roulette russe, il met en danger sa famille en exerçant sur elle un pouvoir de vie et de mort...Il roule comme un dément sur les routes alsaciennes, manquant à tout moment de basculer dans un ravin ou de foncer sur un camion. Car dans ce livre que l’on lit d’un seul tenant, tout peut basculer à chaque page, comme l’auteur, on appréhende l’humeur du père, dont on sait que les "crises" peuvent survenir à tout moment et ses nerfs lâcher, comme il l’explique lui-même.
La nuit, Charles entend sa mère pleurer derrière la cloison de sa chambre, petit garçon, il veille, prêt à la défendre. On parle de "violences faites aux femmes" mais avec ce livre bouleversant, on a le regard d’un enfant apeuré qui doit nous interpeller ! Car là aussi, malgré les signes tangibles, voire les appels de détresse de Charles à travers son comportement incompréhensible à l’école, rien ne se passe vraiment pour l’aider à sortir de ce cauchemar éveillé.
Finalement, sa mère mettra fin à cet enfer en demandant le divorce...Mais là encore, il faut accumuler des preuves, enregistrer les menaces de mort de son mari à son encontre et à son insu. Ce sont aux victimes de prouver qu’elles sont en danger !
Mais derrière cette terreur, ce cri de mal-être qui traverse le livre, il y a fort heureusement des moments de grâce qui ont très certainement contribué à construire la personnalité de Charles Sitzenstuhl.
Ces parenthèses heureuses, il les doit à ses grands-parents maternels, à l’amour de sa mère et de sa soeur et à sa passion du sport. Chilavert lui offre ainsi ses gants de foot, Thierry Omeyer qu’il admire, lui confie son maillot que Charles convoite depuis des mois...Et même si les fêtes de famille se terminent avec le retour des "crises" du père à la maison, que les enfants surnomment entre eux "Hitler", il reste le souvenir de quelques embellies. Si l’on revisite Sélestat et ses alentours avec les yeux de Charles, on perçoit bien que ce dernier aime cette ville et cette région qui l’ont vu naître et d’évidence, l’on pressent que ce livre magistralement écrit, véritable catharsis, lui permet de renaître pour le meilleur à venir.
Françoise Urban-Menninger



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